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Ostéoporose

dernière mise à jour le 09/10/2015

I/ Les mots et les faits

  • Densité minérale osseuse (DMO) : exprimé la densité de l’os
  • Densitométrie osseuse ou ostéodensitométrie : examen radiographique qui permet d’évaluer la densité de l’os et sa richesse en calcium.
  • T-Score : Pour exprimer la densité osseuse. Il ne s’agit pas vraiment d’une unité, mais de l’écart de densité par rapport à la moyenne de la population. Si la densité est à deux écarts-types en dessous de la moyenne, le T-Score est égal à -2. Inversement, si l’os est plus dense que la moyenne, le T-score est alors positif (+1 ou +2).
  • Ostéoporose : diminution de la masse et de la densité osseuse entraînant une fragilité osseuse. On parle d’ostéoporose lorsque le T-Score est inférieur à -2,5
  • Ostéopénie : légère diminution de la densité osseuse, souvent liée à l’âge. On parle d’ostéopénie lorsque le T-score est entre -1 et -2,5
  • Prévention primaire : pour empêcher la survenue d’un accident (ex : une fracture dans le cas de l’ostéoporose)
  • Prévention secondaire : pour empêcher la récidive d’un problème (ex : une seconde fracture après une première)

II/ Combattre les idées reçues

  • L’ostéopénie n’est pas une maladie, toutes les personnes ont une diminution de la densité osseuse avec l’âge.
  • L’ostéoporose n’est doit pas être considérée comme un facteur de risque, tant qu’il n’y a pas eu de fracture, ou qu’elle n’est pas associée à d’autres risques de fracture (voir plus loin).
  • Une faible densité osseuse ne suffit pas pour affirmer qu’il y a une ostéoporose ou un risque de fracture.
  • L’ostéodensitométrie est un examen inutile tant qu’il n’y a pas eu de fracture.
  • L’ostéodensitométrie est inutile dans un programme de prévention des fractures
  • Aucun traitement n’est nécessaire ni utile tant qu’il n’y a pas eu de fracture
  • Beaucoup de fractures chez des femmes ménopausées surviennent en l’absence d’ostéoporose.
  • Le tabagisme est un très important facteur d’ostéoporose
  • La durée utile des traitements est inconnue
  • Il n’existe actuellement aucune évaluation sérieuse de l’efficacité des traitements au-delà de 5 ans.
  • Un traitement de l’ostéoporose est un traitement à long et très long terme. Il apparaît donc totalement inutile au-delà d’un certain âge, surtout s’il y d’autres maladies ou un mauvais état général
  • Le dosage de vitamine D et de calcium ne sert à rien

III/ Les idées forces

  • Un T-score compris entre -2,5 et -3 ne suffit pas pour envisager un traitement car les risques sont supérieurs au bénéfice
  • Après 60 ans, le T-score < 2.5 est chez environ 15% des femmes et 5% des hommes
  • Si la densité osseuse est basse, le risque de fracture est de 1 pour mille vers 50 ans  et 30 pour mille vers 75 ans. Il augmente évidemment plus vite au-delà de 80 ans.
  • Lorsque le T-Score est inférieur à -2,5 il faut au moins un des paramètres suivants pour envisager un traitement :
    • fracture spontanée déjà constatée
    • corticothérapie de plus de 3 mois à une dose > 7,5 mg/jour
    • Suppression des ovaires ou traitement anti-œstrogène chez la femme
    • Suppression des testicules ou traitements anti-androgènes chez l’homme
    • Extrême maigreur (IMC < 19)
    • Carence alimentaire (surtout en protéines) chez les personnes âgées
    • ménopause avant 40 ans ;
    • fracture de fragilité du col fémoral chez un parent du premier degré.
  • Dans tous les cas il faut corriger ou supprimer les facteurs de risque de chute :
    • alcoolisme
    • baisse de l’acuité visuelle
    • traitements de l’hypertension
    • tranquillisants et somnifères
  • Les fractures de l’ostéoporose se produisent en trois endroits
    • Principalement les vertèbres dorsales et lombaires (même sans traumatisme)
    • Le col du fémur lors d’une simple chute (après 80 ans)
    • Plus rarement le poignet lors d’une simple chute (ostéoporoses précoces)
  • On distingue classiquement trois types d’ostéoporoses
    • L’ostéoporose post-ménopausique due à la baisse brutale des œstrogènes. Elle concerne surtout les vertèbres. On l’appelle aussi ostéoporose de type 1 ou ostéoporose trabéculaire.
    • L’ostéoporose sénile qui concerne les hommes et les femmes après 75 ans, surtout les sédentaires. Elle concerne surtout le col du fémur. On l’appelle aussi ostéoporose de type 2 ou ostéoporose corticale.
    • Les ostéoporoses secondaires à une maladie ou à un traitement (hyperthyroïdie, polyarthrite rhumatoïde, maladie de Crohn, traitements de cortisone, traitements anti-œstrogènes ou anti-androgènes)

IV/ Espace d'éducation et de progrès

  • L’exercice physique et la marche sont les deux seuls moyens efficaces de prévenir l’ostéoporose.
  • En cas d’ostéoporose avérée, l’exercice physique et la marche donnent les meilleurs résultats thérapeutiques.
  • Le Z-score mesure l’écart de densité avec les personnes du même âge. Il serait plus logique de l’utiliser, car l’ostéopénie augmente avec l’âge et il est plus précis de comparer un patient aux personnes du même âge. Le Z-Score est souvent noté sur les comptes-rendus des radiologues, mais on a pris la (mauvaise) habitude d’utiliser le T-Score
  • Le traitement hormonal substitutif de la ménopause (THM) est théoriquement et réellement le seul traitement efficace en prévention primaire de l’ostéoporose post-ménopausique. Mais il a trop d’effets indésirables (thromboses, AVC, infarctus, cancers, etc.) et il a été abandonné.
  • La vitamine D seule n’a pas d’effet démontré en prévention des fractures ostéoporotiques et elle expose aux calculs rénaux.
  • L’association de calcium et de vitamine D3 peut éventuellement être utile chez les personnes de plus de 75 ans, peu actives et vivant en institution. Elle évite environ une fracture pour 100 patients traités pendant 3 ans.
  • Les biphosphonates : alendronate, risedronate, etidronate, ibandronate et zoledronate (on les appelle aussi acide alendronique, acide risedronique, etc.). L’alendronate a été le mieux étudié avec des niveaux de preuve acceptables.
    • L’alendronate évite seulement deux fractures pour cent patientes traitées pendant 4 ans. C’est trop faible pour une prévention primaire s’il n’y a pas d’autres facteurs de risque.
    • L’alendronate en prévention secondaire évite 4 fractures pour cent patients traités pendant 3 ans.
    • L’alendronate peut être utilisé en prévention primaire si le T-Score est < -3
    • L’effet secondaire le plus grave des biphosphonates est l’ostéonécrose de la mâchoire.
    • Les autres effets indésirables sont des brûlures digestives
  • Le raloxifène agit comme une hormone en imitant l’action des œstrogènes sur les os
    • réduction significative des fractures vertébrales mais non de la hanche.
    • Le raloxifène évite 2 fractures pour 100 patientes traitées pendant 4 ans.
    • Il présente des risques d’accidents vasculaires et de cancer
    • Le rapport bénéfices/risques est négatif en prévention primaire
    • On peut l’utiliser dans de rares cas en prévention secondaire
  • Le ranélate de strontium est un médicament trop dangereux pour être utilisé dans l’ostéoporose (il est réservé à des cas très particuliers en seconde intention)
  • Le tériparatide (hormone parathyroïdienne) est trop dangereux. Le rapport bénéfices/risques est toujours négatif.
  • Le denosumab est une biothérapie moderne (anticorps monoclonal)
    • Il est théoriquement séduisant (comme toutes les biothérapies)
    • Il est très cher
    • Il ne semble guère plus actif que l’alendronate
    • Il présente également un risque d’ostéonécrose de la mâchoire
    • Un traitement de 3 ans a fait passer le risque de fractures de 7% à 3%
    • Le rapport bénéfices/risques est faiblement positif pour un prix très élevé
  • D’autres biothérapies sont en cours d’évaluation (romosozumab, blosozumab, odanacatib). Elles augmentent la densité osseuse, mais on ne sait pas encore si elles réduisent le risque de fracture !
  • Dans certains cas graves avec fortes douleurs, on peut pratiquer des vertébroplasties (injection de « ciment » dans les vertèbres)

V/ Radio trottoir des erreurs quotidiennes

  • Ma mère avait une forte ostéoporose et je ne voudrais pas devenir comme elle. (La seule chose importante dans les antécédents familiaux est la fracture du col du fémur. C’est facteur de risque qu’il faut ajouter aux autres, mais ce n’est pas le seul, le tabagisme et la sédentarité, par exemple, sont beaucoup plus importants)
  • J’ai un bon Z-Score et un mauvais T-Score, qu’est-ce que ça veut dire. (Il est plus exact de considérer le Z-Score, car il vous compare avec les personnes de votre âge. Dans tous les cas, ces scores ne suffisent pas à indiquer le risque de fracture.)
  • On dit que les hommes ont autant d’ostéoporose que les femmes. (Non, car l’ostéoporose post-ménopausique est la plus fréquente. Par contre les hommes ont autant de risque d’avoir une ostéoporose sénile (type2) surtout s’ils sont peu actifs. Lorsque les hommes étaient beaucoup plus actifs que les femmes, ils avaient aussi beaucoup moins d’ostéoporose sénile. Aujourd’hui effectivement cette différence s’estompe !)
  • Pourquoi on ne me donne aucun traitement alors que j’ai un T-Score à -2,5 ? (Tout simplement parce que c’est inutile si vous n’avez pas encore de fracture et aucun autre facteur de risque)
  • Comment est-il possible que la vitamine D et le calcium ne servent à rien ? (Ils sont très utiles dans l’alimentation, mais les données statistiques confirment que la supplémentation sous forme médicamenteuse n’apporte rien de mieux, sauf chez les personnes immobiles et très âgées)
  • Mais si une personne est immobile, elle n’a pas de risque de fracture. (C’est vrai pour les fractures du col du fémur et du poignet, mais pas pour les fractures vertébrales)
  • Pourquoi on parle de tassement vertébral et pas de fracture (Ce sont deux façons de dire exactement la même chose)
  • J’ai déjà deux fractures de vertèbres, pourquoi on ne me donne pas tout de suite le meilleur médicament ? (Parce qu’il n’y a pas de meilleur médicament. Les plus récents sont souvent théoriquement plus séduisants, parfois plus dangereux et souvent mal évalués. Les plus chers ne sont pas forcément les meilleurs. Il faut toujours bien évaluer le rapport entre les bénéfices et les risques.)
  • Je prends de la cortisone depuis trois mois et j’ai déjà de l’ostéoporose (C’est en effet un facteur de risque supplémentaire. Il faudra peut-être faire un traitement si vous devez en prendre longtemps. Mais l’efficacité est toujours difficile à évaluer, comme les risques supplémentaires.)

 

 

Bibliographie

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Vitamin D with or without calcium supplementation for prevention of cancer and fractures: an updated meta-analysis for the U.S. Preventive Services Task Force
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H.A.S
Les médicaments de l'ostéoporose
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Hagenfeld K et al
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La Revue Prescrire
Ostéodensitométrie chez les femmes ménopausées en bonne santé
LRP; juillet 2007; T27; N°285; P 517-521

La Revue Prescrire
Denosumab (Prolia), Peu d'efficacité en termes de fractures, beaucoup trop de risques
LRP; mars 2011; T31; N°329; p 168-172

La Revue Prescrire
Ranelate de strontium (Protelos) et ostéoporose masculine, plus dangereux qu'utile
LRP; avril 2013; t33; N° 354; p 256

La Revue Prescrire
Prévention des fractures ostéoporotiques : le plus souvent pas de vitamine D
LRP; mai 2014; t34; n° 367; p 374

Letonturier D
Ostéoporose : quoi de neuf en 2015
Médecine; avril 2015; vol 11; N°4; p 155-158

Moyer VA; U.S. Preventive Services Task Force*
Vitamin D and calcium supplementation to prevent fractures in adults: U.S. Preventive Services Task Force recommendation statement
Ann Intern Med. 2013 May 7;158(9):691-6

 

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