humeur du 12/03/2008
Interdiction est un mot délicat à manipuler dans nos pays démocratiques, même lorsqu'il s'agit de santé ou de salubrité publique. Le gouvernement essaie de prohiber la prostitution, discrètement, et la vitesse, de façon plus ostentatoire. Mais, la façon de traiter ces deux interdits est radicalement différente. L'un frappe l'objet du délit et l'autre son utilisateur.
Le gendarme ne songe jamais à verbaliser le véhicule à la place du conducteur. Notre pays autorise la fabrication et l'importation de véhicules dépassant de plus de deux fois la vitesse légale. Ceci ne fait l'objet d'aucun débat.
A l'inverse, dans la prostitution, on s'en prend au producteur et non au consommateur, bien que les débats sur l'utilité de punir les deux soient nombreux.
Les interdictions sont des sujets chargés d'une affectivité déraisonnable, d'où la logique est constamment exclue. Seules deux conduites sembleraient logiques, soit annuler l'interdiction, soit la maintenir en l'attaquant par ses deux bouts : offre et demande, production et consommation.
Le gendarme devrait ainsi pénaliser monsieur Ducon qui conduit et monsieur BMW qui a fabriqué l'objet du délit. Il devrait punir monsieur Dugland qui consomme et madame Delarue qui offre l'objet du délit.
Pourquoi donc n'en est-il pas ainsi ?
Le moraliste me répondra que l'on ne peut pas comparer la prostituée, être de chair empreint des merveilleux sentiments humains, avec une voiture, objet de métal empreint des merveilles de la technologie. Le moraliste a raison, seul un être de chair peut mériter la damnation.
L'historien me répondra que la prostitution est si ancienne qu'elle est un objet de culture qui ne peut plus être soumis à la loi, alors que la vitesse, toute récente, n'est pas encore assimilée par nos lentes biologies. L'historien a raison, la seule loi humaine possible est la force de l'habitude.
Le médecin condamne la vitesse, beaucoup plus dangereuse que la chair, malgré le Sida. Par contre, il s'incline devant le constructeur automobile qui prétend offrir aux amateurs, la vitesse comme un luxe (réserve de puissance), et non comme une nécessité. Le sexe est-il un luxe ou une nécessité ? Peu importe, car en cas de compulsion, luxe et nécessité se confondent.
D'autres explications, enfin, sont plus réalistes, donc plus triviales. Les nations peuvent taxer la vitesse par ses deux bouts (essence et amendes), mais ils n'osent taxer aucun bout de la chair, surtout pas le bout du gland, de peur d'être grossiers. Pourtant, l'idée d'un état proxénète ne me paraît ni plus choquante, ni moins dérisoirement utile que celle d'un état fabricant d'armes, si les buts clairement avoués, sont d'éviter l'esclavage sexuel ou la terreur nucléaire.
Il ne faut enfin pas oublier, que derrière tous les interdits, se cachent les privilèges de l'impunité. J'imagine fort bien nos élus, aller sans honte, se faire sauter un PV pour excès de vitesse...
Mon imagination s'arrête là !
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