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Relations entre allergies et helminthes

dernière mise à jour le 23/01/2015

L’allergie ou atopie est caractérisée par une augmentation des anticorps IgE qui ont une haute affinité pour le récepteur Fc epsilon RI présent sur plusieurs cellules sanguines (éosinophiles, basophiles, mastocytes) et sur les cellules de Langerhans épidermiques. La fixation sur les mastocytes provoque la libération de médiateurs inflammatoires dont l’histamine en grande quantité.

Pour des raisons inconnues, la prévalence des maladies allergiques a fortement augmenté dans le monde développé. Cette augmentation ne se constate pas dans les pays en voie de développement, même si les concentrations en IgE sont souvent très élevées chez les personnes de ces pays, en raison de leur induction non spécifique par les helminthes omniprésents.

Nous proposons ici une explication de ce paradoxe basée sur les propriétés de la molécule toxique dite « ES-62 », sécrétée par certains parasites nématodes (vers ronds). Nous avons constaté que cette toxine hautement purifiée est capable d’inhiber la libération des médiateurs de l’allergie en se fixant sur les récepteurs Fc epsilon RI des mastocytes. Ce processus complexe bloque les signaux de transduction de la phospholipase D-couplée, de la sphingosine kinase et du facteur nucléaire kappa B. La molécule ES-62 agit en formant un complexe avec le Toll Like Récepteur 4, ce qui aboutit à une séquestration de la protéine kinase C alpha (PKC-alpha), puis à sa dégradation. Cette molécule étant indispensable au couplage entre le Fc epsilon RI et la phospholipase D, cela empêche l’activation des mastocytes et la libération des médiateurs de l’inflammation.

Nous démontrons également qu’ES-62 est capable de protéger les souris des réactions d’hypersensibilité induites par les mastocytes au niveau de la peau et des poumons. Intéressante voie de recherche pour des thérapeutiques antiallergiques.

Il est intéressant de noter que Fc epsilon RI est aussi présent sur des cellules présentatrices d’antigènes et qu’il contrôle la production de nombreux médiateurs de l’immunité et de l’inflammation (cytokines, interleukines, leucotriènes et prostaglandines).

Ceci montre l’importance de la présence des helminthes dans la constitution de notre système immunitaire et vient renforcer l’hypothèse hygiéniste des maladies allergiques, mais aussi des maladies inflammatoires et auto-immunes.

Bibliographie

Melendez A.J., Harnett M.M., Pushparaj P.N., Wong W.S.F., Tay H.K., McSharry C.P., Harnett W.
Inhibition of FceRI-mediated mast cell responses by ES-62, a product of parasitic filarial nematodes
Nature Medicine, 13 (11). P:1375-1381.
DOI : 10.1038/nm1654

Médecine évolutionniste (ou darwinienne)

Depuis quelques années, le problème de l'antibiorésistance, les progrès de la génomique, la redécouverte du microbiote et la prise en charge de maladies au long cours, nécessitent l'introduction d'une pensée évolutionniste dans la réflexion clinique

Le premier diplôme universitaire intitulé "Biologie de l'évolution et médecine" a été mis en place à la faculté de Lyon en 2016.

La phrase biomédicale aléatoire

Il apparaît que définir la physiologie comme la science des lois ou des constantes de la vie normale ne serait pas rigoureusement exact, pour deux raisons. D'abord parce que le concept de normal n'est pas un concept d'existence, susceptible en soi de mesure objective. Ensuite, parce que le pathologique doit être compris comme une espèce du normal, l'anormal n'étant pas ce qui n'est pas normal, mais ce qui est un autre normal. Cela ne veut pas dire que la physiologie n'est pas une science. Elle l'est authentiquement par sa recherche de constantes et d'invariants, par ses procédés métriques, par sa démarche analytique générale. Mais s'il est aisé de définir par sa méthode comment la physiologie est une science, il est moins aisé de définir par son objet de quoi elle est la science. La dirons-nous science des conditions de la santé ? Ce serait déjà, à notre avis, préférable à science des fonctions normales de la vie, puisque nous avons cru devoir distinguer l'état normal et la santé. Mais une difficulté subsiste. Quand on pense à l'objet d'une science, on pense à un objet stable, identique à soi. La matière et le mouvement, régis par l'inertie, donnent à cet égard toute garantie. Mais la vie ? N'est-elle pas évolution, variation de formes, invention de comportements ? Sa structure n'est-elle pas historique autant qu'histologique ? La physiologie pencherait alors vers l'histoire qui n'est pas, quoi qu'on fasse, science de la nature. Il est vrai qu'on peut n'être pas moins frappé du caractère de stabilité de la vie. Tout dépend en somme, pour définir la physiologie, de l'idée qu'on se fait de la santé.
― Georges Canguilhem

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