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Cancer, inflammation et microbes

dernière mise à jour le 14/09/2015

Le dérèglement des fonctions immunitaires est impliqué dans la pathogenèse de nombreuses maladies humaines courantes. Vivre dans un environnement urbain, pauvre en microbes, peut avoir une influence sur la fonction immunitaire et, éventuellement, sur la carcinogenèse. Malheureusement, peu d'études ont jusqu'ici abordé le rôle de l'exposition à l'environnement microbien sur le risque de cancer. Quels mécanismes sont perturbés chez les personnes sujettes au développement d’une inflammation chronique, suite à une exposition sans danger pour d’autres ?

Des travaux récents en immunologie ont révélé que les cellules Th17, un troisième sous-ensemble de cellules Th, et des cytokines proinflammatoire, en particulier IL-23, sont étroitement liées à l’inflammation associée à une tumeur. Même si le rôle des cellules Th17 dans le cancer est encore imprécis et sujet à débats, de nombreuses preuves montrent qu’elles sont augmentées dans une large gamme de tumeurs humaines, et quelles peuvent favoriser l'angiogenèse, la croissance tumorale et l'inflammation.

Les lymphocytes T régulateurs, à leur tour, semblent avoir des effets de contre-régulation sur les cellules Th17 et peuvent inhiber leur fonction. Ainsi, le système de régulation, induit et renforcé par une exposition continue aux microbes de l'environnement, peut jouer un rôle important dans l’immunobiologie de la tumeur en empêchant l'établissement d’une inflammation chronique dans les premières phases.

En outre, la découverte du système de récepteurs de type Toll (TLR) a apporté un éclairage nouveau sur les micro-organismes ; la signalisation continue, via ces TLR et d'autres récepteurs qui détectent des composants microbiens, est nécessaire pour l'intégrité des cellules épithéliales, la réparation des tissus et la récupération après une blessure.

Nous résumons ici les données épidémiologiques relatives à la vie dans des environnements aux expositions microbiennes diverses et le risque de cancer, et nous discutons les mécanismes immunologiques liés, en se concentrant sur les liens entre l’environnement microbien, l’axe Th17 / IL-23 et l'inflammation associée au cancer.

Il semble qu’un environnement normalement riche en microbes peut limiter la l’inflammation responsable de la prolifération tumorale. Et qu’inversement un environnement trop stérile peut majorer l’inflammation. Mais de nouvelles études sont nécessaires pour confirmer cette hypothèse. 

Bibliographie

Von Hertzen LC, Joensuu H, Haahtela T.
Microbial deprivation, inflammation and cancer
Cancer Metastasis Rev. 2011 Jun;30(2):211-23.
DOI : 10.1007/s10555-011-9284-1

 

Médecine évolutionniste (ou darwinienne)

Depuis quelques années, le problème de l'antibiorésistance, les progrès de la génomique, la redécouverte du microbiote et la prise en charge de maladies au long cours, nécessitent l'introduction d'une pensée évolutionniste dans la réflexion clinique

Le premier diplôme universitaire intitulé "Biologie de l'évolution et médecine" a été mis en place à la faculté de Lyon en 2016.

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La phrase biomédicale aléatoire

Le "nerveux" est un merveilleux marchepied conceptuel. C'est un mot tampon d'une très grande utilité sanitaire, créé par des médecins précurseurs, et adopté à l'unanimité par les patients. Le "nerveux" est un sas de communication dans la relation médecin malade, une escale sur l'itinéraire qui passe du soma au psyché. Le "nerveux" est ce qui reste lorsque la main du médecin revient bredouille, l'image du radiologue quelconque ou l'analyse du biologiste insignifiante. Le "nerveux" signe la bénignité et réduit l'angoisse. Le symptôme nerveux, clown ridicule ou pantin fanfaron qui annule des siècles de conquêtes médicales, peut aussi être le point de départ, vers une nouvelle aventure de la communication, car il peut s'ennoblir en psychique ou se sublimer en existentiel. S'il est dérisoire en tant qu'impasse diagnostique, il devient prodigieux en tant que passerelle métaphysique. En se débarrassant de sa pelure organique, le symptôme nerveux quitte le monde charnel, pour conquérir le monde mystique ou règne un inconscient supposé, maître des vices et des vertus.
― Luc Perino

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