lucperino.com

Reflux gastro-œsophagien (RGO) – Régurgitations - Œsophagite

dernière mise à jour le 18/01/2018

I/ Les mots et les faits

  • Estomac (Gaster en grec) : gastro, gastrique : tout ce qui se rapporte à l’estomac
  • Œsophage : tube reliant le pharynx à l’estomac
  • Suc gastrique : sécrétion normale de l’estomac. Cette sécrétion est acide. La muqueuse gastrique est faite pour supporter l’acidité
  • Muqueuse œsophagienne : tissu qui tapisse l’intérieur de l’œsophage. Cette muqueuse n’est pas faite pour supporter l’acidité
  • Œsophagite : inflammation pathologique de la muqueuse de l’œsophage
  • Reflux gastro-œsophagien : remontée du contenu acide de l’estomac vers l’œsophage
  • RGO : sigle très couramment utilisé pour nommer le reflux gastro- œsophagien
  • Régurgitation : lorsqu’une partie du contenu de l’estomac remonte jusqu’à la bouche ou au pharynx, sans nausée ni effort d’expulsion (donc très différent d’un vomissement).
  • Régurgitation acide : lorsque le contenu de la régurgitation brûle la gorge
  • Cardia : zone de jonction entre œsophage et estomac. Cette zone forme un angle nommé « angle de Hiss ». Elle possède un sphincter (muscle) assez peu puissant.
  • Hiatus : orifice – l’œsophage passe par un hiatus situé au centre du diaphragme
  • Hernie hiatale : lorsqu’une partie de l’estomac passe, en remontant, au travers du hiatus du diaphragme
  • Pyrosis : sensation de brûlure le long de l’œsophage, avec ou sans régurgitation
  • Rétrosternal : qui se situe derrière le sternum (le pyrosis est une douleur rétrosternale)

II/ Combattre les idées reçues

  • Il existe souvent des RGO sans hernie hiatale
  • Il peut y avoir des petites hernies hiatales sans RGO et sans œsophagite
  • L’acidité de l’estomac est normale, elle aide l’organisme à lutter contre les nombreux microbes que nous avalons.
  • Il existe des RGO sans régurgitation
  • Un RGO occasionnel est un phénomène physiologique normal
    • 25% des adultes ont un symptôme de RGO une fois par mois
    • 10% des adultes ont un symptôme de RGO une fois par semaine
    • 5% des adultes ont un symptôme de RGO une fois par jour

III/ Les idées forces

  • Les RGO surviennent généralement après les repas
  • Les symptômes possibles du RGO sont les suivants :
    • Pyrosis : douleurs rétrosternales pouvant irradier dans le thorax, la mâchoire, le cou, le dos et le pharynx
    • Régurgitations acides
    • Douleurs à la déglutition (dysphagie ou odynophagie)
    • Douleurs épigastriques dans 25% des cas
    • Pharyngites, laryngites (enrouement)
    • Toux chronique (le plus souvent nocturne), bronchospasme (asthme)
  • Les facteurs qui favorisent un RGO sont les suivants :
    • Repas gras, épicé, alcoolisé
    • Position couchée et penchée en avant
    • L’obésité et la suite de chirurgie pour obésité
  • Certains médicaments favorisent le RGO :
    • Théophylline (traitement de l’asthme)
    • Inhibiteurs calciques et aliskirène (traitements de l’hypertension artérielle)
    • Dérivés nitrés (traitement de l’angor)
    • Nicotine (pour le sevrage du tabac)
    • Analogues du glp1 (exenatide et liraglutide dans le diabète de type 2)
    • Médicaments atropiniques (très nombreux)
    • Progestérone
  • Les complications du RGO sont très rares
    • L’œsophagite est une inflammation de l’œsophage : elle est rare et facile à traiter
    • Le brachyoesophage (raccourcissement de l’œsophage) est exceptionnel
    • Les ulcères et/ou hémorragies de l’œsophage sont rarissimes
  • La plupart des RGO se traitent avec des mesures assez simples
    • Manger lentement et bien mâcher
    • Eviter les repas trop gras ou trop épicés
    • Eviter de s’allonger tête basse ou de se pencher en avant après les repas
    • Eviter les efforts après les repas
    • Perdre du poids si nécessaire
    • Eviter les ceintures trop serrées
    • Surélever la tête du lit de  10 à  15 cm
    • Supprimer le tabac
    • Diminuer les épices, l’alcool, le chocolat, les agrumes, le café et les boissons gazeuses

IV/ Espace d'éducation et de progrès

  • Des médicaments peuvent être parfois utilisés lorsque les symptômes sont trop gênants ou durent trop longtemps
  • Les traitements antiacides classiques sont souvent efficaces
    • Sels d’aluminium (ils peuvent constiper) (à éviter en cas d’insuffisance rénale)
    • Sels de magnésium (ils peuvent provoquer des diarrhées)
    • Carbonate de calcium
    • Bicarbonate de soude (à éviter en cas d’insuffisance rénale, cardiaque et d’hypertension).
    • Tous diminuent l’absorption des autres médicaments (il faut attendre trois heures avant de  prendre un autre médicament)
    • Leur association avec d’autres pansements gastriques (alginates ou simeticone) n’est pas utile.
  • En cas d’échec des précédents, on peut utiliser l’omeprazole (ou les autres médicaments de la classe des IPP)
    • Il est très efficace en quelques jours
    • Il ne faut pas l’utiliser plus de quatre semaines, car s’il n’a pas eu de résultat durant ce temps, il n’en aura jamais
    • Il a très peu d’effets secondaires (diarrhée, céphalées, problèmes cutanés).
    • Il peut diminuer l’absorption d’autres médicaments (surtout digoxine et méthotrexate)
    • Il devient dangereux lorsqu’on l’utilise à très long terme : risque de fractures, d’anémies par  manque de fer et de vitamine B12, risque de graves infections digestives et pulmonaires
  • Le rebond acide est le seul véritable problème de l’oméprazole et de tous les IPP
    • L’acidité gastrique ré-augmente brusquement à l’arrêt du traitement
    • Le patient a alors la fausse impression que les symptômes s’aggravent
    • C’est pour cela qu’il reprend le médicament ou que le médecin le prescrit de nouveau
    • Alors qu’il lui suffirait d’attendre quelques jours
    • Un traitement continu devient alors dangereux
  • Il faut éviter les autres antiacides comme les anti-H2 (cimétidine, ranitidine) qui moins efficaces et ont trop d’interactions médicamenteuses
  • Il faut éviter le métoclopramide et la domperidone, car ce sont des neuroleptiques « cachés »  inefficaces dans les RGO
  • La chirurgie doit être évitée à tout prix, car elle ne modifie aucun risque à long terme
  • D’une manière générale, de nos jours, le RGO est largement surestimé et surtraité. Il s’agit d’un trouble bénin.
  • L’acidité gastrique est normale et souhaitable, c’est un facteur protecteur
  • Il n’y a presque jamais besoin de pratiquer des examens en cas de RGO. On peut en pratiquer dans certains des cas suivants :
    • Symptômes qui persistent sans diminuer après 4 semaines d’omeprazole
    • RGO apparaissant pour la première fois après 50 ans
    • Rechutes trop fréquentes
    • Présences d’autres symptômes inquiétants : amaigrissement, anémie
    • Dans ces cas, on pratique deux examens : endoscopie de l’œsophage et mesure de l’acidité de l’œsophage
  • Cas particulier des femmes enceintes
    • La moitié d’entre elles ont un RGO à cause de la pression abdominale
    • Il faut absolument éviter les médicaments
    • Le seul à utiliser est l’omeprazole lorsque les symptômes sont vraiment trop gênants
  • Cas particulier des nourrissons
    • Les  régurgitations sont normales jusqu’à l’âge de 1 an
    • En cas de véritable RGO (pleurs persistants), on peut mesurer l’acidité et prescrire de l’omeprazole (les autres antiacides et les alginates ne suffisent pas)

V/ Radio trottoir des erreurs quotidiennes

  • Cela fait trop longtemps que je souffre de ma hernie hiatale, je voudrais qu’on m’opère. (La hernie hiatale ne fait pas directement souffrir, vous devez avoir une douleur d’œsophagite, il faut utiliser tous les traitements non médicamenteux et l’oméprazole en cures courtes. La chirurgie ne change rien aux complications à long terme.)
  • Je suis obligé de prendre du Mopral® en permanence, car dès que j’arrête, j’ai mal. (C’est normal, c’est à cause du rebond d’acidité à l’arrêt du traitement. Plus vous prendrez le traitement longtemps, plus le rebond acide sera fort ; c’est une véritable accoutumance. Il faut arrêter l’omeprazole et le prendre au cas par cas, sinon les autres risques sont plus importants.)
  • Mon enfant a des régurgitations qui le font pleurer. (Les régurgitations sont normales jusqu’à l’âge de un an. S’il pleure trop souvent, vous pouvez lui donner un peu d’omeprazole, rarement et jamais de façon continue.)
  • J’ai des régurgitations acides qui me brûlent, mon reflux doit être grave. (Des régurgitations acides peuvent exister sans que le RGO soit forcément important.)
  • J’ai souvent mal, mais je n’ai pas de régurgitations. (Il existe de nombreux RGO avec pyrosis, mais sans régurgitation.)
  • Je tousse la nuit, on m’a dit que ça pouvait être un RGO. (C’est possible, mais si la toux persiste après 6 semaines d’omeprazole, il vaut mieux chercher une autre cause.)

Bibliographie

Bavishi C, Dupont HL
Systematic review: the use of proton pump inhibitors and increased susceptibility to enteric infection
Aliment Pharmacol Ther. 2011 Dec;34(11-12):1269-81
DOI : 10.1111/j.1365-2036.2011.04874.x

Beauchamp GA, Winstanley EL, Ryan SA, Lyons MS
Moving beyond misuse and diversion: the urgent need to consider the role of iatrogenic addiction in the current opioid epidemic
Am J Public Health. 2014 Nov;104(11):2023-9
DOI : 10.2105/AJPH.2014.302147

Chou R, Turner JA, Devine EB, Hansen RN, Sullivan SD, Blazina I, Dana T, Bougatsos C, Deyo RA
The effectiveness and risks of long-term opioid therapy for chronic pain: a systematic review for a National Institutes of Health Pathways to Prevention Workshop
Ann Intern Med. 2015 Feb 17;162(4):276-86
DOI : 10.7326/M14-2559

Cicero TJ et coll
The changing face of heroin use in the United States : a retrospective analysis of the past 50 years
JAMA Psychiatry, 2014 ; 71 : 821–826

Dart RC, Surratt HL, Cicero TJ, Parrino MW, Severtson SG, Bucher-Bartelson B, Green JL
Trends in opioid analgesic abuse and mortality in the United States
N Engl J Med. 2015 Jan 15;372(3):241-8
DOI : 10.1056/NEJMsa1406143

Daum AM, Berkowitz O, Renner JA Jr
The evolution of chronic opioid therapy and recognizing addiction
JAAPA. 2015 May;28(5):23-7
DOI : 10.1097/01.JAA.0000464268.60257.ad

Dhalla IA , Persaud N, Juurlink DN
Facing up to the prescription opioid crisis
BMJ, 343, 5142, 2011
DOI : http://dx.doi.org/10.1136/bmj.d5142

Dowell D, Haegerich TM, Chou R
CDC Guideline for Prescribing Opioids for Chronic Pain--United States, 2016
JAMA. 2016 Apr 19;315(15):1624-45
DOI : 10.1001/jama.2016.1464

Galinkin J, Koh JL
Recognition and management of iatrogenically induced opioid dependence and withdrawal in children
Pediatrics. 2014 Jan;133(1):152-5
DOI : 10.1542/peds.2013-3398

Jacobson B, Nyberg K, Gronbladh L, Eklund G, Bygdeman M, Rydberg U
Opiate addiction in adult offspring through possible imprinting after obstetric treatment
BMJ 1990;301:1067
DOI : 10.1136/bmj.301.6760.1067

Jansson C, Nordenstedt H, Wallander MA, Johansson S, Johnsen R, Hveem K, Lagergren J
A population-based study showing an association between gastroesophageal reflux disease and sleep problems
Clin Gastroenterol Hepatol. 2009 Sep;7(9):960-5
DOI : 10.1016/j.cgh.2009.03.007

Jenkinson AD, Kadirkamanathan SS, Scott SM, Yazaki E, Evans DF
Relationship between symptom response and oesophageal acid exposure after medical and surgical treatment for gastro-oesophageal reflux disease
Br J Surg. 2004 Nov;91(11):1460-5

Kvistholm Jensen A, Simonsen J, Ethelberg S
Use of Proton Pump Inhibitors and the Risk of Listeriosis: A Nationwide Registry-based Case-Control Study
Clin Infect Dis. 2017 Apr 1;64(7):845-851
DOI : 10.1093/cid/ciw860

Lazarus B, Chen Y, Wilson FP, Sang Y, Chang AR, Coresh J, Grams ME
Proton Pump Inhibitor Use and the Risk of Chronic Kidney Disease
JAMA Intern Med. 2016 Feb;176(2):238-46
DOI : 10.1001/jamainternmed.2015.7193

Merino JG
slowing the opioid analgesic overdose epidemic
BMJ 2013;346:f730

Prescrire rédaction
Reflux gastro-oesophagien chez un adulte
Premiers choix Prescrire, Actualisation mai 2017

Prescrire rédaction
Patientes enceintes ayant un reflux gastro-oesophagien
Revue Prescrire, juillet 2015, tome 35, N° 381, p 521-525

Rantanen TK, Sihvo EI, Räsänen JV, Salo JA
Gastroesophageal reflux disease as a cause of death is increasing: analysis of fatal cases after medical and surgical treatment
Am J Gastroenterol. 2007 Feb;102(2):246-53

Rawson RA et coll
OxyContin abuse : who are the users ?
Am J Psychiatry 2007 ; 164 : 1634-1636

Sarkar M, Hennessy S, Yang YX
Proton-pump inhibitor use and the risk for community-acquired pneumonia
Ann Intern Med. 2008 Sep 16;149(6):391-8

Tavernise Sabrina
F.D.A. Likely to Add Limits on Painkillers
The New-york Times, January 25, 2013

Van Zee A
The Promotion and Marketing of OxyContin: Commercial Triumph, Public Health Tragedy
Am J Public Health. 2009 February; 99(2): 221–227
DOI : 10.2105/AJPH.2007.131714

 

RARE

Site médical sans publicité
et sans conflit d'intérêts.

 

Autres fiches patients

Otite moyenne aiguë de l'enfant - I / Les mots et les faits Otite moyenne aiguë (OMA) : infection [...]

Hypertension artérielle - I / Les mots et les faits Systole : moment où le cœur se [...]

TDAH : Trouble déficitaire de l'attention avec ou sans hyperactivité - I/ Les mots et les faits   TDAH: Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans [...]

test - §  Partie I : Généralités sur les virus Différence fondamentale entre virus et [...]

Phimosis et prépuce - I / Les mots et les faits   Gland : bout du sexe du garçon, ainsi dénommé en raison de sa [...]

Vous aimerez aussi ces humeurs...

Douleurs et fatigues chroniques - Les troubles psychosomatiques, tels qu’une tachycardie d’angoisse, une rougeur de gêne ou [...]

Nouvelle boucle du tabac - Importé par les explorateurs de l’Amérique, le tabac fut l’un des premiers traitements [...]

Perturbateurs de l'appariement - Sachant que la pilule contraceptive est un puissant perturbateur endocrinien, nous supposions [...]

Toucher des écrouelles - De tous temps, les souverains ont appuyé leur pouvoir sur la monnaie, l’armée, la justice, la [...]

Évolution des épidémies - Lors d’une épidémie, les autorités n’ont pas d’autre choix que celui de la prudence, [...]

La phrase biomédicale aléatoire

Alcmeon dit que la santé se maintient par les droits égaux (isonomia) des qualités, humide, sec, chaud, amer, sucré et autres, tandis que le règne exclusif (monarchia) parmi elles produit la maladie. Les maladies arrivent, en ce qui concerne l'agent, à cause de l'excès du chaud ou du sec ; en ce qui concerne l'origine, à cause de l'excès ou du manque de nourriture ; en ce qui concerne le lieu, dans le sang, la moelle ou le cerveau. Il dit qu'elles naissent parfois aussi des causes externes, telles que les eaux, le lieu, les fatigues, l'angoisse ou les choses analogues. La santé, c'est le bon mélange.
― Alcméon de Crotone, vers - 500 avant JC

Haut de page