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Évolution de notre espèce depuis 2000 ans

dernière mise à jour le 30/03/2023

Une question est fréquemment posée aux biologistes de l’évolution : "Les humains évoluent-ils encore ?" 

La réponse est évidemment « Oui ». Mais jusqu’à nos jours, nous ne possédions de preuves directement observables d'une telle évolution que pour quelques traits tels que la maturité reproductive plus précoce chez les femmes et la ménopause plus tardive, ainsi que pour une diminution de la pression artérielle et de la fréquence de quelques maladies cardiaques.

Cependant, aujourd’hui, nous avons des preuves pour un bien plus grand nombre de traits, grâce au séquençage de l'ADN. Nous pouvons non seulement regarder l'ADN directement, mais par diverses approches statistiques, nous pouvons voir les gènes dont la fréquence a changé si rapidement qu'elle résulte obligatoirement d’une sélection naturelle positive. 

L’article conclue que plusieurs traits, dont la tolérance au lactose, la couleur des cheveux et des yeux, et certaines parties du système immunitaire, ainsi que la taille, ont évolué au cours des 2 000 dernières années.

Les auteurs ont séquencé 3 915 génomes dans la population britannique en essayant de trouver des preuves d'une sélection récente. 

Comment fonctionne cette sélection ? Si un allèle rare devient soudainement favorable, sa fréquence augmentera rapidement, et il entraînera avec lui l'ADN des régions adjacentes, car la recombinaison n’a pas le temps de séparer le site sélectionné des sites adjacents sur les chromosomes. (C’est le principe de ce que l’on nomme « l’auto-stop génétique », car la recombinaison est rare entre des morceaux d'ADN étroitement espacés). Les calculs consistent alors à examiner la distance entre les sites (singletons) sélectionnés et les sites variables alentour. On peut en déduire quels sont les nucléotides dont la fréquence s’est élevée assez récemment.

Les auteurs ont ainsi détecté plusieurs événements de sélection au cours des 2 000 dernières années (environ 75 générations). Voici quelques gènes et traits dont les statistiques indiquent qu'ils ont fait l'objet d'une sélection au cours des deux derniers millénaires environ.

Persistance de la lactase : le gène de la digestion du lactose, la lactase, est généralement désactivé au sevrage. Dans les populations «pastorales» - celles qui élèvent des moutons, des chèvres ou des vaches et boivent leur lait - il y a une forte sélection (un avantage reproductif d'environ 10%) pour garder le gène activé, car le lait est une riche source de nutriments. Ceci est connu depuis longtemps, mais les auteurs ont réussi à montrer le processus de sélection du gène en observant les distances entre les singletons et l’allèle de persistance de la lactase .

 

Gènes associés à la pigmentation. Les loci de la couleur de peau sont vraisemblablement soumis à la sélection des peaux claires dans les climats du nord, mais les auteurs n’ont pas montré de signal significatif de sélection récente ; en revanche, ils ont montré une sélection pour des gènes associés à la pigmentation, tels que cheveux blonds, taches de rousseur, yeux bleus, etc.

Les mêmes démonstrations ont été faites pour prouver une sélection positive des gènes responsables de l’augmentation de la taille, ainsi que pour de nombreux gènes du système immunitaire, comme on pouvait s’y attendre. Mais aussi pour la circonférence de la tête à la naissance, la largeur des hanches de la femme, la réponse à l’insuline, le cholestérol et bien d’autres gènes sélectionnés en seulement 2000 ans.

Les auteurs concluent que ceux qui prétendent que l'évolution humaine s'est arrêtée disent simplement des bêtises.

Bibliographie

Field Y, Boyle EA, Telis N, Gao Z, Gaulton KJ, Golan D, Yengo L, Rocheleau G, Froguel P, McCarthy MI, Pritchard JK
Detection of human adaptation during the past 2000 years. Science
Science. 2016 Nov 11;354(6313):760-764
DOI : 10.1126/science.aag0776

Médecine évolutionniste (ou darwinienne)

Depuis quelques années, le problème de l'antibiorésistance, les progrès de la génomique, la redécouverte du microbiote et la prise en charge de maladies au long cours, nécessitent l'introduction d'une pensée évolutionniste dans la réflexion clinique

Le premier diplôme universitaire intitulé "Biologie de l'évolution et médecine" a été mis en place à la faculté de Lyon en 2016.

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