humeur du 30/11/2023
Le dernier congrès européen de diabétologie a donné l’alerte sur un fardeau mondial croissant : le prédiabète.
Précisons avant tout que « diabète » désigne deux maladies totalement différentes. Une maladie auto-immune grave nommée diabète de type 1 (DT1) et une maladie de civilisation très fréquente, liée aux excès de consommation de sucre, nommée diabète de type 2 (DT2). La conservation du même nom pour deux maladies aussi dissemblables fait partie des aberrations qui ne peuvent s’expliquer que par des intérêts n’ayant rien à voir avec la science clinique.
Lorsque les médias ou les médecins parlent de diabète sans mentionner le numéro, ils évoquent toujours le DT2, car il représente 95% de l’ensemble.
A son début le diagnostic de DT2 était posé pour une glycémie à jeun supérieure à 1,4 g/l. Puis ce taux est passé à 1,2g/l, faisant doubler d’un coup le nombre de diabétiques dans le monde.
Le DT2 survient lorsque l’insuline n’arrive plus à faire face à l’excès de consommation de sucre. Tout commence par une insulino-résistance, aujourd’hui détectable, que l’on nomme donc le prédiabète. Quelle extraordinaire découverte : les maladies incubent avant d’être détectables. Nous avons donc tous une pré-surdité, une pré-impuissance, une pré-Alzheimer, voire un pré-cancer.
Mais on peut détecter le prédiabète encore bien plus tôt en observant la consommation de sucre qui est passée de 7 kg par an et par personne au moyen-âge à 30 à 100 kg aujourd’hui.
Les congressistes ont estimé que 20% des prédiabètes évolueront en DT2 dans les 5 ans. Qui aurait pu le croire ? Ils ont osé une prévision de 10 % de prédiabétiques dans la population en 2045. Cela parait bien peu au vu de la consommation de sodas et autres sucreries consommées à tout âge et hors de toute raison.
Le bubble-tea est une nouvelle boisson très sucrée dont la prévision de marché est de 5 milliards € annuels. Le marché des antidiabétiques étant bien plus élevé, les laboratoires peuvent s’offrir des congrès savants, alors que les marchands de soda ne peuvent s’offrir que des publicités télévisées. Fort heureusement pour le commerce, les plus gros buveurs de soda sont aussi les plus téléphiles et les plus savants diabétologues sont aussi les plus congressistes.
Le congrès s’est enfin effrayé de voir des pays inconscients qui ne dépistent pas le prédiabète. Ces mêmes pays ne savent probablement pas mieux dépister les pré-diarrhées, pré-paludismes et pré-tuberculoses qui vont tuer 6 millions de personnes chaque année.
Les publications triviales de ces congrès sponsorisés répondent aux critères exigibles pour être publiés par des revues scientifiques. Prouesse de la mercatique médicale consistant à bafouer le bon sens sans véritablement corrompre la science. Rien à redire. Même l’OMS approuve ces rapports.
Avez-vous remarqué que le verbe « durer » a disparu des médias ? Aujourd’hui, malgré notre société de zapping, tout « perdure ».
L’humanité pourra-t-elle perdurer après la découverte du prédiabète ?
Liu Y et al
Novel clusters of prediabetes and their association with progression and regression: a 3-year follow-up study
OP 13 - Beyond type 1 and type 2 – 74 - EASD Annual Meeting, 21. September 2022
Nicolaisen SK et al
Incidence of HbA1c-defined prediabetes and progression to type 2 diabetes: a nationwide study with routine care laboratory data
58th EASD Annual Meeting, 21. September 2022
Perino L
Diabète de type 2, une aberration nosographique
Médecine, vol 6, N° 7, septembre 2010, p 331-333
DOI : 10.1684/med.2010.593
Sun H, Magliano DJ et al
IDF Diabetes Atlas: Global, regional and country-level diabetes prevalence estimates for 2021 and projections for 2045
Diabetes Research and Clinical Practice, Volume 183, January 2022, 109119
Par catégorie professionnelle | |
Médecins | 27% |
Professions de santé | 33% |
Sciences de la vie et de la terre | 8% |
Sciences humaines et sociales | 12% |
Autres sciences et techniques | 4% |
Administration, services et tertiaires | 11% |
Economie, commerce, industrie | 1% |
Médias et communication | 3% |
Art et artisanat | 1% |
Par tranches d'âge | |
Plus de 70 ans | 14% |
de 50 à 70 ans | 53% |
de 30 à 50 ans | 29% |
moins de 30 ans | 4% |
Par motivation | |
Patients | 5% |
Proche ou association de patients | 3% |
Thèse ou études en cours | 4% |
Intérêt professionnel | 65% |
Simple curiosité | 23% |
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Le symptôme est présenté, offert par le malade. Le signe est cherché et obtenu par artifice médical.
― Georges Canguilhem