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Urticaire

dernière mise à jour le 02/05/2018

I/ Les mots et les faits

  • Urticaire : maladie de la peau caractérisée par des plaques rouges en relief, à bords irréguliers, souvent fugaces, migratoires et accompagnées de prurit (démangeaison)
  • Urticaire aigue : lorsque les symptômes ne durent que quelques heures à quelques jours.
  • Urticaire chronique : lorsque ce phénomène dure ou récidive pendant plus de 6 semaines
  • Angio-œdème : œdème de la peau et des muqueuses qui accompagne assez souvent les crises d’urticaire.
  • Œdème de Quincke : autre nom donné aux angio-œdèmes importants de la face et des muqueuses ORL au cours de l’urticaire.
  • Urticaire superficiel : on utilise souvent ce terme pour nommer l’urticaire sans angio-œdème
  • Urticaire profond : on utilise parfois ce terme pour désigner les crises d’urticaire où l’angio-œdème est important.
  • Immunoglobulines E  (IgE) : ce sont des protéines de médiation des réactions allergiques, chacune se spécialisant dans un allergène précis (pollen, venin, aliment, etc.) 
  • Mastocyte : globule blanc présent dans les tissus conjonctifs de la peau et de plusieurs muqueuses. Il contient de nombreux granules (vésicules) remplis d’histamine, sérotonine et héparine. Sa surface contient des IgE.

II/ Combattre les idées reçues

  • Les urticaires d’origine allergique sont très rares (5 à 10 % de l’ensemble des urticaires).
  • La très grande majorité des urticaires ne sont pas d’origine allergique.
  • Hélas, il est difficile de distinguer cliniquement une urticaire allergique d’une non allergique.
  • Trouver la cause exacte d’une crise d’urticaire est souvent difficile
  • Les urticaires d’origine allergique sont toujours de courte durée
  • Une urticaire, même généralisée et même avec un gros œdème peut être totalement bénigne,
  • Une éruption plus modérée mais associée à des signes non cutanés peut être plus inquiétante.
  • Seules les urticaires allergiques présentent un risque potentiel de gravité, avec risque ultérieur possible de choc anaphylactique.

III/ Les idées forces

  • L’urticaire est un phénomène très fréquent puisque 20% des personnes en souffrent un jour ou l’autre au cours de leur vie (soit une personne sur cinq)
  • Le diagnostic clinique de l’urticaire est très facile avec ses trois symptômes
    • Prurit
    • Plaque rouge sur la peau
    • Angio-œdème (pas toujours présent)
  • Les angio-œdèmes
    • Il s’agit d’une urticaire plus profonde
    • Ils se produisant ou le tissu cutané est plus lâche (paupières, lèvres, muqueuses ORL, organes génitaux externes).
    • Ils ne sont pas un signe de gravité surtout s’il s’agit d’une urticaire chronique (durée supérieure à 6 semaines).
    • Ils ne permettent pas de différencier l’origine allergique ou non
  • Les urticaires chroniques :
    • Elles sont définies par une durée ou des récidives durant plus de 6 semaines
    • Elles ont la même apparence
      • 20% seulement ont un angio-œdème (urticaire profonde)
      • 40 % ont une urticaire simple (superficielle)
      • 40% ont les deux formes (superficielle et profonde)
    • S’il une urticaire dure plus de 6 semaines, les enquêtes allergologiques sont inutiles, car elles seront toujours toutes négatives. Il n’existe aucun risque d’anaphylaxie, même en cas d’œdèmes ORL importants.
    • L’urticaire chronique n’est pas une maladie allergique, elle est liée à une fragilité particulière des mastocytes de la peau qui réagissent à divers stimuli non spécifiques (infections, médicaments, stress, etc.).
    • Les médicaments sont la première cause des urticaires chroniques.
  • Il y a donc deux grands types d’urticaire
  • Les urticaires allergiques :
    • Ces urticaires sont également nommées « immunologiques » ou « IgE-dépendantes ».
    • Elles résultent du contact entre une IgE et un allergène.
    • Le phénomène physiologique est nommé « hypersensibilité immédiate » comme pour d’autres allergies.
    • Ce sont les plus rares (seulement 5 à 10 % de toutes les formes d’urticaire)
    • Seules les urticaires d’origine allergique présentent un risque potentiel en cas de récidive.
    • La forme la plus grave de récidive est le fameux choc anaphylactique (heureusement très rare, mais parfois mortel).
  • Les urticaires non allergiques (aussi nommées « non immunologiques »)
    • Ce sont les plus fréquents (plus de 90% des urticaires)
    • Elles ne sont donc pas spécifiques d’un antigène
    • Aigues ou chroniques, elles ne présentent aucun risque.
    • Elles peuvent avoir plusieurs causes :
      • une activation mécanique (pression),
      • un phénomène physique (froid, chaud),
      • un contact avec un neuromédiateur (stress)
      • un contact avec un microorganisme (bactérie, virus, parasite)
      • l’action chimique directe d’une substance (codéine, fraise, etc.).
  • Comment faire la différence entre urticaire allergique et non allergique ?
    • Dans les urticaires allergiques, il y a souvent des signes non cutanés ;
      • gêne respiratoire, asthme, simple toux,
      • douleurs abdominales, vomissements,
      • sensation de malaise, grande fatigue.
    • Ces signes extra-cutanés sont très importants à déceler chez les enfants pour savoir si une urticaire est immunologique, (donc potentiellement grave en cas de récidive).
    • Attention : tous ces signes extra-cutanés disparaissent assez rapidement (quelques heures après l’arrêt de l’exposition).
    • Ce qui est caractéristique d’une urticaire allergique est la chronologie des événements :
      • Délai court entre le contact allergénique et le début des symptômes (toujours moins d’une heure, le plus souvent 10 à 15 minutes)
      • Evolution spontanément favorable en moins de 24 heures (le plus souvent 5 à 7 heures).
    • Il est donc très important de savoir :
      • S’il s’agit d’un premier épisode ou non.
      • La durée de chaque épisode (d’autant plus risqués qu’ils sont courts)
      • S’il y a des signes cliniques non cutanés (digestifs, respiratoires, etc.) à cause du risque anaphylactique.
    • Une urticaire qui persiste plusieurs jours, même si un allergène potentiel a été introduit dans l’heure précédant le début de l’éruption, même si les symptômes sont apparus rapidement, ne peut pas être d’origine allergique. /li>

IV/ Espace d'éducation et de progrès

  • Une crise d’urticaire résulte d’une dégranulation des mastocytes. Les vésicules libèrent surtout de l’histamine. Puis secondairement il y a production de diverses substances (leucotriènes, prostaglandines, cytokines et chémokines).
  • L’activation mastocytaire provoque une vasodilatation (érythème ou rougeur) et un œdème (papule) donnant la plaque d’urticaire cliniquement très facile à diagnostiquer.
  • Cas très particulier de l’urticaire d’effort :
    • On la nomme aussi anaphylaxie induite par l’effort
    • On la nommait parfois ‘urticaire cholinergique’, mais ce terme ne doit plus être utilisé, car il est inexact.
    • Il y a prurit généralisé et une urticaire diffuse, avec ou sans angio-œdème, au cours ou au décours immédiat d’un effort physique
    • C’est une forme d’allergie résultant de l’association entre un aliment consommé 2h à 5h auparavant et un effort physique intense ou prolongé.
    • Plusieurs aliments peuvent être responsables (céréales, farine de blé, fruits frais, fruits secs, arachide, etc.)  
    • Le déclencheur est un mécanisme IgE-dépendant, mais ce n’est pas une véritable allergie, car l’aliment seul ne provoque pas de crise. (L’effort seul non plus).
    • Il y a presque toujours des signes non cutanés (gêne respiratoire, malaise, etc.).
    • L’anaphylaxie à l’effort est en voie d’augmentation chez les enfants, pour des raisons encore inconnues.
  • Les nombreuses urticaires d’origine physique
  • Le dermographisme est la plus connue et la plus « originale » des urticaires physiques.
    • Il s’agit de lésions qui surviennent après grattage et suivent précisément les lignes de grattage. (on peut littéralement « écrire » sur la peau avec l’ongle)
    • Il est plus fréquent chez les enfants.
  • L’urticaire retardée à la pression apparaît 6 à 8 heures après une pression sur la peau
  • L’urticaire au chaud ou au froid existe sous deux formes 
    • réflexe généralisée au chaud ou au froid
    • urticaire localisée de contact avec du chaud ou du froid
  • L’urticaire au froid peut être secondaire à certaines maladies nommées ‘cryopathies’
  • L’urticaire solaire est rare et survient 5 à 20 minutes après exposition au soleil.
  • L’urticaire aquagénique, encore plus rare, apparaît lors du contact avec l’eau.
  • Il existe des urticaires déclenchées par des vibrations (marteau-piqueur !)
  • Particularités des urticaires de l’enfant
  • Les enfants font plus d’urticaire aiguë et moins d’urticaire chronique
  • Les urticaires physiques sont rares sauf le dermographisme.
  • Les œdèmes peuvent parfois se situer aux extrémités (pieds, mains) avec fréquemment des ecchymoses et du purpura.
  • Les causes les plus fréquentes chez les nourrissons sont les infections virales saisonnières (respiratoires et ORL).
  • Mais beaucoup d’autres virus peuvent déclencher des crises d’urticaire (hépatite A et B, Epstein Barr, cytomégalovirus, herpès, influenza, parvovirus, entérovirus.
  • Ainsi que des infections bactériennes (Streptocoque β-hémolytique, Mycoplasme, Chlamydia, etc.) ou parasitaires (Toxacara, Anisakis).
  • Les médicaments sont la seconde cause d’urticaire aiguë chez l’enfant (13 % des cas). Particulièrement les antibiotiques et les anti-inflammatoires non stéroïdiens.
  • Les urticaires allergiques sont un peu plus fréquentes chez l’enfant que chez l’adulte :
    • Aliments (lait de vache , banana, avocat, kiwi, œuf, arachide, soja, lupin, moutarde, crustacés, poisson , mais aussi poissons crus ou peu cuits contenant le parasite Anisakis.
    • Médicamenteux (β-lactamines, AINS, etc.)
    • Végétaux (pollens, orties, primevères...)
    • Animaux (acariens, chenilles processionnaires, venins d’hyménoptères, moustiques, léchage par animal de compagnie
    • Substances chimiques ou biologiques (acide benzoïque, acide sorbique, etc.).
  • La grande majorité des urticaires aiguës de l’enfant dure quelques jours, puis régresse sans séquelle
  • 5% seulement peuvent durer jusqu’à 15 jours.
  • Seul 1 à 3 sur mille évoluent vers une urticaire chronique.
  • Les urticaires chroniques pédiatriques sont rares, leur pronostic est bon, 50% des enfants sont guéris après 5 ans d’évolution.
  • Certaines urticaires chroniques de l’enfant (rarissimes) sont liées à une maladie génétique ou un syndrome auto-inflammatoire rare.
  • Traitement
    • Le plus important de tous les traitements est de trouver l’agent responsable et de l’éliminer
    • On utilise classiquement des antihistaminiques surtout en cas d’urticaire d’effort.
    • Il faut éviter la desloratadine avant un an, et les autres antihistaminiques chez les très jeunes enfants
    • Il ne faut pas donner de corticoïdes chez les enfants, ni dans les urticaires aiguës, ni dans les urticaires chroniques, même s’il y a un œdème du visage, car le risque d’induire une cortico-dépendance est élevé.
    • La ciclosporine et l’omalizumab sont des médicaments parfois utiles en deuxième intention, en cas d’échec dans les cas graves.

V/ Radio trottoir des erreurs quotidiennes

  • J’ai eu une très forte crise d’urticaire et on m’a dit que c’était dû au stress, ce n’est pas possible, je dois être allergique à quelque-chose. (Les urticaires d’origine allergique sont les plus rares. Elles peuvent avoir de multiples causes, dont certaines causes très étonnantes comme le stress ou l’effort, seuls ou associés à d’autres facteurs.)
  • Je traîne de l’urticaire depuis 3 mois et on ne me fait aucun test allergique. (Lorsqu’une urticaire dure plus de 6 semaines, on peut être certain que tous les tests allergologiques seront négatifs. Et même s’il y a un test positif à un produit quelconque, il pourra expliquer une autre maladie, mais pas votre urticaire.)
  • Mon enfant a fait une forte crise avec un œdème et l’on n’a même pas fait de cortisone. (La cortisone est à éviter chez les jeunes enfants, car il y a un risque de dépendance. Si c’est une première crise, il n’y a aucun risque, il faut juste essayer de comprendre la cause et si elle n’est pas allergique, il n’aura jamais besoin de cortisone.)
  • J’ai une urticaire chronique et on ne trouve rien. (Il faudra cependant essayer sans doute supprimer tous les médicaments que vous prenez, car ils sont la première cause d’urticaire chronique.) 
  • Je ne comprends pas, j’ai de l’urticaire et on me dit que je ne suis pas allergique. (Dans 90% des cas, chez l’adulte, l’urticaire n’a pas d’origine allergique.)
  • Mon fils fait une allergie à l’arachide et à l’effort, et on me dit qu’il peut continuer à consommer de l’arachide. J’ai très peur d’un choc. (C’est vrai qu’il est difficile de comprendre qu’il ne s’agit pas d’une véritable allergie, mais simplement de la réunion de deux facteurs qui produit une réaction sur les mastocytes et donne de l’urticaire. Ce type de réaction est parfois impressionnant, mais pas dangereux.)

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