humeur du 11/02/2011
      L’histoire  de la science n’a pas été linéaire, cependant l’historien est dans l’obligation  de mentionner les faits qui ont marqué ses progrès plus que ceux qui en ont  constitué une régression. 
        Ce  sont souvent les découvertes majeures qui font s’opérer les plus grands reculs,  comme si une contre-réaction populaire à des progrès trop rapides finissait par  atteindre les scientifiques et les faiseurs d’opinion.
      
        L’un  des exemples les plus connus est celui de l’eugénisme prôné par certains scientifiques  et mis en œuvre dans certains états pour diminuer la variabilité de notre  espèce, juste après que Darwin eût démontré que la variabilité était le moteur  essentiel de l’évolution. 
      
        L’histoire  de l’hygiène offre un exemple étonnant de régression due aux progrès de  l’épidémiologie.
      
Même  l’eau, corollaire de la vie, s’est offert les caprices d’une histoire non  linéaire !
      
Alors  que les bienfaits des thermes étaient connus depuis l’antiquité, la découverte  de la notion de « contagion » comme facteur essentiel de transmission  des épidémies entraîna une régression de l’hygiène.
        Georges  Vigarello rapporte qu’aux XVII° et XVIII° siècles en France, nombreux étaient  ceux qui considéraient l’eau comme néfaste pour l’hygiène et la santé ! 
      
Elle  fragilisait un corps supposé « poreux » et son usage permettait aux agents  infectieux de franchir les barrières naturelles de la peau, de s’immiscer au  cœur de l’organisme humain, de le déséquilibrer et de l’altérer. Se laver  pouvait nuire à la vue, engendrer des maux de dents et des catarrhes, pâlir le  visage, le rendre plus vulnérable au froid en hiver et au hâle en été.
      
Il fallait éviter l’immersion et pour protéger son corps des méfaits de l’eau, il fallait en boucher les pores. Les nourrissons étaient parfois enduits de cendre de moule, de cendre corne de veau ou de cendre de plomb mêlée avec du vin pour obturer leurs pores.
L’histoire ne dit pas pourquoi le vin ne traversait pas  les pores, ni combien de nourrissons en sont morts.
        La  toilette sèche était recommandée. L’idéal étant de changer la chemise  lorsqu’elle devenait noire, car la blancheur restait un signe de  civilité !
      
        L’histoire  ne dit pas non plus si la triste réputation des Français autour de l’hygiène  leur vient de cette époque. 
        Nous  savons aujourd’hui que l’excès d’hygiène est l’un des facteurs du développement  des maladies auto-immunes et allergiques.
      
        Faut-il  avoir peur de la science ou seulement regretter son mésusage et notre manque de  tact et mesure à son égard ?
         
Vigarello Georges 
Le Propre et le sale
Seuil, 1985 
  
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