dernière mise à jour le 31/01/2017
D’un point de vue évolutionniste, puisque les maladies mentales ne confèrent a priori aucun avantage adaptatif aux intéressés, les facteurs de susceptibilité génétique pour ces affections devraient se tarir au fil des générations, sauf si d’autres mécanismes contrecarrent cette évolution. Mais on ignore comment ces prédispositions génétiques aux maladies mentales se maintiennent au cours du temps dans la population, malgré une « pression de sélection négative » à leur égard.
Fruit d’une collaboration britannique et suédoise, cette vaste étude épidémiologique évalue « l’aptitude à la reproduction de sujets avec schizophrénie, autisme, troubles bipolaires, anorexie mentale, ou addiction », cette fécondité des patients étant comparée à celle de leurs fratries non affectées par ces mêmes problématiques. Excepté pour les femmes déprimées, on constate que le fait d’être concerné par l’un de ces diagnostics psychiatriques s’accompagne d’une « baisse significative » de la fécondité (Intervalle de Confiance à 95% [0,23–0,93], p< 10-10), cette réduction se révélant « toujours plus marquée chez les hommes que chez les femmes », ce qui pourrait suggérer une « sensibilité masculine particulière » (en matière de vulnérabilité génétique aux maladies mentales).
Les sœurs des patients schizophrènes ou bipolaires ont une fécondité plus élevée que la moyenne ([1,2–1,3], p<0,01), mais cet accroissement est trop faible pour compenser la baisse de fécondité observée chez les intéressés eux-mêmes. Au contraire, la fécondité des frères de schizophrènes et d’autistes est (faiblement) réduite ([0,94–0,97], p<0,001). Une augmentation significative de la fécondité est constatée chez les frères et sœurs de patients atteints de dépression ou de toxicomanie ([1,01–1,05], p< 10-10) et pour les fratries de sujets déprimés, cette augmentation fait « plus que compenser la baisse de fécondité des individus concernés. »
Les auteurs estiment qu’une « forte pression de sélection » existe contre toutes ces maladies mentales, sauf pour le trouble bipolaire qui ne « paraît pas concerné par une forte pression de sélection négative. » Quoi qu’il en soit, puisque la fréquence de ces troubles psychiatriques ne diminue pas au cours du temps, malgré la fécondité amoindrie des malades mentaux, c’est que d’autres facteurs tendent à compenser probablement cette raréfaction des gènes de prédisposition, comme des mutations inopinées ou d’autres « mécanismes encore inconnus. »
Power RA, Kyaga S, Uher R, MacCabe JH, Långstrom N, Landen M, McGuffin P, Lewis CM, Lichtenstein P, Svensson AC
Fecundity of patients with schizophrenia, autism, bipolar disorder, depression, anorexia nervosa, or substance abuse vs their unaffected siblings
JAMA Psychiatry. 2013 Jan;70(1):22-30
DOI : 10.1001/jamapsychiatry.2013.268.
(abstract français de Alain Cohen publié sur le JIM le 02/04/2013)
Depuis quelques années, le problème de l'antibiorésistance, les progrès de la génomique, la redécouverte du microbiote et la prise en charge de maladies au long cours, nécessitent l'introduction d'une pensée évolutionniste dans la réflexion clinique.
Le premier diplôme universitaire intitulé "Biologie de l'évolution et médecine" a été mis en place à la faculté de Lyon en 2016.
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