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Drogues du terrorisme

humeur du 14/11/2015

L’éthologie a démontré les nombreux mécanismes d’inhibition mis en place par l’évolution pour éviter de tuer un congénère de la même espèce. Même si les rivalités sont fortes et les combats fréquents, il est exceptionnel qu’ils conduisent à la mort d’un belligérant.
Homo sapiens ne fait pas exception, et même s’il a produit de nombreuses machines permettant des exterminations médiates et à distance, il a globalement conservé les mécanismes d’inhibition de la tuerie immédiate. Larguer une bombe est plus facile que de planter une baïonnette dans un ventre.

Le nationalisme, l’endoctrinement et la manipulation mentale ont été largement utilisés par les chefs de guerre, les maffias et les sectes avec succès, mais ils ne peuvent suffire à expliquer le niveau de certaines barbaries.
L’utilisation de drogues est un moyen stratégique efficace qui semble être largement sous-estimé par les enquêteurs, sociologues et commentateurs.
Même si le fait a été exagéré, il ne fait plus aucun doute que l’alcool était un stimulant des poilus de la grande guerre.
Les horreurs tels que des bébés coupés en deux, lors des massacres du GIA en Algérie dans les années 1990 s’expliquent par l’utilisation abondante de drogues. L’une d’elles, le trihexyphénidyle, médicament antiparkinsonien détourné de son usage, considéré comme   « l’ecstasy des pauvres » était aussi surnommé « madame courage » car, utilisé avec des benzodiazépines ou du cannabis, il favorisait le passage à l’acte violent (comme beaucoup de psychotropes actuels).La cocaïne et les amphétamines sont bien connues sur tous les lieux d’activisme et de combat.

Les terroristes d’aujourd’hui appartiennent à des organisations criminelles qui vivent de différents trafics : drogue, femmes, œuvres d’art et autres. Beaucoup d’entre eux sont de grands drogués, que ce soit en Afrique ou au Moyen-Orient. En droguant leurs kamikazes, ils ne se distinguent en rien des maffias qui droguent leurs prostituées pour les encourager au travail.

La barbarie est bien souvent chimique et j’ignore si l’on dose systématiquement les substances psychoactives chez les terroristes capturés ou abattus. Si cela est fait, il est étonnant qu’il y ait aussi peu d’informations sur ce thème qui tient certainement un rang élevé dans la liste des causes du passage à l’acte terroriste.

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― Luc Perino

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