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Statistiques vulgaires

humeur du 25/07/2025

Si vous affirmez qu’une seule année de tabagisme diminue la durée de vie de deux mois en moyenne, il y a toujours quelqu’un pour citer le grand-père mort à 95 ans après avoir fumé toute sa vie. Lorsque vous mentionnez un faible niveau cognitif comme facteur de risque de maladie d’Alzheimer, nul n’oubliera de vous citer un prix Nobel atteint de cette maladie. Si vous parlez du lien entre le sucre et l’obésité, on vous parlera immanquablement d’un voisin très maigre qui ne cesse d’en manger.

Pour la majorité, les statistiques médicales n’ont jamais la force de pénétration d’une anecdote ou d’un cas individuel.

Si ces mêmes détracteurs apprennent qu’un médicament diminue de 10% le risque d’une maladie touchant 5% de la population, ils le consommeront sans noter l’impact dérisoire et virtuel de 0,5% sur leur durée de vie, sans se soucier d’effets secondaires, et sans tenter de comparaison avec le sevrage de sucre ou de tabac.

Il semble qu’une forme d’optimisme béat persuade chacun de pouvoir échapper aux statistiques morbides et d’être le premier bénéficiaire des gélules de jouvence.

L’ignorance de la moyenne ou de l’écart-type et la confusion entre risque absolu et risque relatif sont entretenues par les industriels du tabac du sucre ou du médicament.

Les médecins sont les premiers promoteurs de cette ignorance, pour des raisons essentiellement financières. Mais ne les condamnons pas trop vite cependant.

Si l’on propose un paiement à la tâche à n’importe quel employé, par exemple 10 euros quelle que soit la durée de la tâche : cinq minutes ou deux heures. Il ne fait aucun doute que tous choisiront des tâches de cinq minutes.

Cinq minutes suffisent largement pour faire une ordonnance issue de savantes recherches encore plus savamment médiatisées, alors qu’il faut plus de deux heures pour déconseiller un dépistage inutile, supprimer un médicament sans bénéfice ou expliquer des statistiques que le patient ne comprendra pas dans la plupart des cas.

Voilà pourquoi ce sont bien plus souvent des retraités ou des médecins ayant déjà construit leur maison qui encouragent à la « déprescription » et à l’éducation sanitaire.

Mais ne condamnons pas davantage les jeunes médecins qui doivent nourrir leur famille et construire leur maison. Ils le font en accord parfait avec les études de l’industrie, sans être contredits par leur faculté, sans aucun risque juridique et sous la protection de tous les ministères qui ont façonné le paiement à l’acte.

Enfin, tous les citoyens et tous les médecins, jeunes ou vieux, paient aussi leur cotisation à la vénérable institution de la Sécurité Sociale qui met généreusement de l’huile dans les rouages de cette symbiose.

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