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Évolution des régimes alimentaires au cours de l'hominisation

dernière mise à jour le 16/10/2014

Ne sont mentionnés ici que les points sur lesquels existe un consensus

Thème N° 1 - Régime et nutrition aux premiers âges de l’humanité

La sélection a favorisé dès le début de l’hominisation les régimes les plus flexibles.
Malgré des spécialisations occasionnelles comme l’alimentation très carnée de Neandertal, tout suggère un très large éventail d’aliments.
Les aliments dits “de réserve” utilisés en conditions climatiques extrêmes n’ont contribué qu’à des adaptations ponctuelles sans grande importance sélective.
Au début de l’hominisation, la dureté des aliments est prouvée par la rapide croissance dentaire, les grosses molaires, l’émail épais et la robustesse cranio-faciale, caractères qui ont diminué avec l’apparition du genre homo suggérant un changement d’alimentation.
Les différentes tailles des espèces d’homo laissent perplexes sur la période où se sont établies les proportions actuelles, mais il semble évident que le changement a consisté en une plus grande proportion de viande dans l’alimentation. Ils semblent que tous les homos aient convergé vers un régime commun malgré les différences d’environnement.

A la fin du paléolithique, les humains avaient un large éventail d’aliments animaux et végétaux.
L’agriculture a provoqué un nouveau changement avec un apport bien plus important de plantes, céréales et féculents. L’essentiel du changement est caractérisé par une diminution des protéines et une augmentation des hydrates de carbone (sucres). Au cours des cinquante dernières années, cette augmentation de la consommation de sucre a été fulgurante particulièrement en Amérique en provoquant un énorme taux d’obésité.

Thème N° 2 - Récentes évolutions humaines et adaptation génétique aux régimes

La persistance de la lactase pour digérer le lait après le sevrage est une adaptation sélective, probablement au cours de périodes de disette. Cette adaptation est apparue dans les Balkans et s’est répandue en Europe du Nord, elle semble plus liée au taux d’augmentation de population qu’à des habitudes alimentaires géographiques.
Cette persistance de la lactase peut avoir joué un rôle dans la résistance à la malaria. Le plasmodium a besoin de PABA (paraaminobutiric acid) pour survivre et les produits laitiers en sont pauvres.
Le nombre de copies du gène de l’amylase salivaire offre un autre exemple de l’adaptation génétique humaine à la teneur en amidon des différents aliments sauvages ou domestiques. Cependant, il persiste un doute sur un tel maintien de la variabilité du gène de l’amylase salivaire, car l’amidon est davantage digéré par l’intestin.
L’enzyme AGT (alanine glyoxylate aminotransferase) exerce son activité principalement dans les mitochondries chez les espèces carnivores et dans les peroxysomes chez les herbivores. En devenant omnivore, l’homme a acquis un polymorphisme corrélé à son régime alimentaire. Par exemple les Saami dont les ancêtres avaient un régime très carné ont plus d’allèles favorisant l’activité mitochondriale de l’AGT.
Les gènes qui codent des enzymes de détoxication comme le cytochrome P450 sont également très variables en relation avec l’amplitude des régimes alimentaires.
La tolérance à l’alcool pourrait également résulter d’une adaptation génétique, ou inversement, l’intolérance à l’alcool comme chez certains peuples d’Asie.

Chez les humains et les grands singes, il y a eu une réduction de l’activité de l’uricase, enzyme qui métabolise l’acide urique issu de la digestion de viande.
Les relations bien connues entre couleur de la peau et métabolisme de la vitamide D semblent aussi liées à des adaptations aux régimes alimentaires.
La persistance de la lactase et la couleur plus blanche de la peau présentent une forte corrélation. L’origine de cette corrélation peut être une coadaptation ou une plus forte concentration en vit D aux plus hautes latitudes.

Thème 3 : Origine et nature des "Maladies du monde moderne".

Les modes de vie et les régimes alimentaires ne produisent pas les mêmes effets dans toutes les populations humaines, avec quelques disparités remarquables chez certains groupes ethniques. L’exemple le plus connu concerne « l’occidentalisation du régime » qui entraîne un fort ratio de diabète et de syndrome métabolique chez les indiens Pimas et très peu chez les Sibériens, alors que ces derniers ont un fort ratio d’hypertension lors du changement de régime.
Ces observations intéressantes ne permettent pas encore de connaître la part des différences génétiques, des conduites sociales, des effets épigénétiques ou de leurs combinaisons.

Les femmes Caucasiennes ont une meilleure oxydation des graisses que les Africaines. La forte corrélation entre la disposition abdominale des graisses et le syndrome métabolique est très bien établie. Par ailleurs, il semblerait que les graisses abdominales riches en macrophages jouent un rôle immunitaire qui serait un sélecteur efficace dans les pays où sévissent de nombreuses maladies. Ces graisses servent de réserve d’énergie et contiennent des enzymes transformant les hormones stéroïdes et pouvant jouer un rôle non négligeable dans les différences sexuelles, les stratégies reproductives, les pathologies ou bien d’autres aspects ethniques d’ordre social ou biologique.

Le consensus est absolu sur le rôle clé de la balance énergétique (ratio apport énergétique/exercice physique) dans l’épidémie d’obésité. Le régime alimentaire et le mode de vie sont d’une égale importance. Il faut agir sur les deux paramètres en considérant le rôle clé des facteurs épigénétiques et du développement précoce de l’enfant.

Le changement brutal de mode de vie d’une population est un facteur majeur de risque d’obésité (immigrations). Les facteurs génétiques n’expliquent que 5% des obésités morbides. Les facteurs les plus consensuels sont le poids prénatal, le poids de naissance, la courbe de croissance, l’exercice régulier de l’enfant, le mode d’allaitement et les maladies infectieuses.

Aucun régime “paléolithique” idéal ne saurait régler tous ces problèmes !!

Bibliographie

Jay T W.R. Leonard, J.T. Stock, C.R. Valeggia.
Rapporteurs of Diet and Nutrition Workshop in a conference on Evolution and Diseases of Modern Environments
Berlin Charité October 13-14, 2009. In conjunction with The World Health Summit.

Médecine évolutionniste (ou darwinienne)

Depuis quelques années, le problème de l'antibiorésistance, les progrès de la génomique, la redécouverte du microbiote et la prise en charge de maladies au long cours, nécessitent l'introduction d'une pensée évolutionniste dans la réflexion clinique

Le premier diplôme universitaire intitulé "Biologie de l'évolution et médecine" a été mis en place à la faculté de Lyon. Voir ICI

La médecine clinique et le métier de clinicien

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