lucperino.com

D’accord mais de mort lente

humeur du 05/07/2022

La « pression parasitaire » est l’ensemble des infections qui menacent une espèce. C’est le plus gros fardeau environnemental de l’humanité. Cette pression est maximale au niveau des tropiques, elle décroît avec la latitude. Le froid diminue le nombre et la vitalité des vecteurs et ralentit la croissance des bactéries. Seuls certains virus savent profiter du froid qui fragilise nos muqueuses nasales et bronchiques. Les viroses respiratoires ne connaissent ni la météorologie, ni la latitude.

Avec l’urbanisation et les voyages intercontinentaux, l’humanité a connu ses plus effroyables épidémies, jusqu’à décimer des populations entières. Diarrhées de l’Indus, variole et rougeole en Amérique, peste en Europe, puis syphilis, choléra et tuberculose avec l’urbanisation.

L’impact n’était pas que sanitaire, il était aussi démographique, car ces maladies tuaient leurs victimes avant l’âge de la reproduction. Cela signifie que nous sommes les descendants des survivants, de ceux qui avaient l’immunité suffisante pour avoir le temps de procréer. Nous avons tous hérité du meilleur capital immunitaire possible, par le jeu normal de la sélection naturelle.

Les vaccins constituent le plus gros progrès de la médecine. Cependant, la variole est l’unique maladie qui a pu être éradiquée par un vaccin ; la polio sera peut-être la prochaine. Pour tous les autres vaccins, la maladie persiste, obligeant à vacciner chaque nouvelle génération. Enfin, on ne peut logiquement pas éradiquer une maladie qui touche aussi d’autres espèces que la nôtre et dont la transmission se fait par simple contact ou par l’air. Ces pourquoi les viroses respiratoires ne cesseront jamais.

Par définition, les personnes qui n’ont pas un bon système immunitaire sont plus difficiles à protéger par un vaccin, même en multipliant le nombre d’injections. Le système immunitaire vieillit comme tous les autres systèmes. C’est pour cela que les maladies infectieuses sont l’une des quatre façons classiques de mourir avec les maladies tumorales, cardio-vasculaires et neuro-dégénératives.

Alors pourquoi la mort par maladie infectieuse semble inacceptable alors que nous sommes tacitement résignés aux trois autres causes ? Comment peut-on avoir la naïveté de penser que l’on pourra empêcher les infections de tuer au troisième âge ?

Il y a plusieurs explications possibles. Le succès des vaccins a fait oublier leurs limites. On est dans le déni du vieillissement du système immunitaire, alors que l’on accepte le vieillissement de nos neurones, de nos artères, de notre peau, de nos reins et de nos articulations. Enfin, la raison la plus probable est la rapidité de la mort après diagnostic, alors que les trois autres tuent plus lentement.

On a reproché à Brassens d’être politiquement incorrect en déclarant qu’il voulait bien « mourir pour des idées, d’accord, mais de mort lente ». Nous sommes comme lui pour les maladies, mais sans la gouaille lucide du poète philosophe.

Profil de nos 5000 abonnés

Par catégorie professionnelle
Médecins 27%
Professions de santé 33%
Sciences de la vie et de la terre 8%
Sciences humaines et sociales 12%
Autres sciences et techniques 4%
Administration, services et tertiaires 11%
Economie, commerce, industrie 1%
Médias et communication 3%
Art et artisanat 1%
Par tranches d'âge
Plus de 70 ans 14%
de 50 à 70 ans 53%
de 30 à 50 ans 29%
moins de 30 ans  4%
Par motivation
Patients 5%
Proche ou association de patients 3%
Thèse ou études en cours 4%
Intérêt professionnel 65%
Simple curiosité 23%

Vous aimerez aussi ces humeurs...

L’inégalité d’accès aux soins n’est plus ce qu’elle était - Dans les années 1960, vingt ans après la création de la sécurité sociale, les dépenses de [...]

Déclin de la transcendance - La neurophysiologie fascine par ses progrès fulgurants et agace par sa prétention à percer [...]

Le sport nuit à la médecine - On ne cesse de répéter que la France souffre d’un manque de médecins. Plusieurs solutions [...]

N’épousez pas de vieux messieurs - À leur naissance, les femmes ont un stock limité d’ovocytes dont certains subiront une [...]

La médecine n’a pas de projet social - Que les soignants submergés par leur altruisme, les médecins obsédés par la norme [...]

La phrase biomédicale aléatoire

Le libéralisme contemporain est économique et moral. Dans le domaine économique (libéralisme de droite), la logique est de faire gagner les gagnants, en assistant les perdants, juste assez pour qu’ils restent consommateurs, et, dans le domaine moral (libéralisme de gauche), de faire gagner les perdants, ou les « victimes » en leur donnant plus de droits et en les affranchissant des règles morales considérées a priori comme forcément répressives.
― Marc Grassin et Frédéric Pochard

Haut de page