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Constipation

dernière mise à jour le 05/07/2017

I/ Les mots et les faits

  • Constipation : ralentissement du transit intestinal accompagné d’une déshydratation des selles. Il faut bien distinguer la constipation-symptôme de la constipation-maladie.
  • Constipation-symptôme : la constipation est le symptôme d’une autre maladie qui peut être digestive ou extra-digestive
  • Constipation-maladie : la constipation est isolée. On dit qu’elle est primitive ou essentielle. Dans ces cas, il s’agit d’une maladie le plus souvent subjective. Certaines personnes ne se considèrent pas constipées avec une seule selle par semaine, d’autres se considèrent constipées avec une selle par jour.
  • Nombre normal de selles : Il y a une grande variation d’un individu à l’autre. On considère que le nombre normal de selles peut aller de trois par jour à une par semaine.
  • Colopathie fonctionnelle ou syndrome du côlon irritable : maladie intestinale peu grave, mais parfois gênante qui se traduit par une alternance entre diarrhée et constipation ainsi que des douleurs, gaz et flatulences.
  • Fécalome : Matières desséchées bloquées dans le rectum. Il ne peut pas s’évacuer naturellement. À différencier des bouchons qui peuvent s’évacuer spontanément.
  • Maladie des laxatifs : maladie sévère provoquée par une phobie de la constipation et l’usage abusif de laxatifs irritants ou stimulants.

II/ Combattre les idées reçues

  • La longueur de l’intestin a peu d’impact sur la fréquence des selles.
  • Il n’existe aucun nombre idéal de selles. Il peut y avoir naturellement de trois selles par jour à une selle par semaine.
  • La constipation n’est jamais grave, sauf quand elle survient après l’âge de 40 ou 50 ans chez quelqu’un qui ne se plaignait pas d’être constipé auparavant. Dans ce cas, il s’agit d’une constipation-symptôme qui peut provenir d’une maladie plus grave.
  • Il ne faut pas traiter la constipation avec des médicaments, car c’est généralement un facteur d’aggravation.
  • Les laxatifs irritants sont absolument déconseillés, bien qu’ils soient en vente libre en pharmacie.
  • Il ne faut jamais décider seul de prendre un médicament contre la constipation.
  • L’occlusion intestinale survient exceptionnellement après une constipation, elle a bien d’autres causes.
  • L’occlusion intestinale se caractérise aussi par une absence de gaz. S’il y a des gaz, il ne s’agit pas d’une occlusion intestinale.

III/ Les idées forces

  • Le sigmoïde est la partie terminale du colon. Le sigmoïde est très mobile et lorsqu’il déverse son contenu dans le rectum, cela provoque l’envie d’aller à la selle.
  • Si on se retient d’aller à la selle, les matières fécales peuvent se dessécher dans le rectum et favoriser la formation d’un « bouchon » susceptible de favoriser la constipation.
  • Cependant, le vrai fécalome est très rare.
  • La constipation primitive a trois causes :
    • La sédentarité
    • Le manque de boissons
    • Le manque de fibres végétales dans l’alimentation
  • Il faut ajouter le changement de mode de vie : voyages, horaires de travail, contraintes professionnelles, etc.
  • La constipation est plus fréquente en cours de grossesse. Le fer, souvent prescrit à tort chez les femmes enceintes, aggrave encore la constipation
  • La constipation est fréquente chez les personnes âgées
  • La constipation est fréquente chez les grabataires et en fin de vie (cas particulier)
  • Le traitement de la constipation se résume à trois actions
    • Augmenter les fibres végétales dans l’alimentation : céréales, son de blé, haricots blancs, pois-chiches, lentilles, carottes, chou vert, amandes, noix, bananes, pommes, poires, fraises.
    • Boire davantage
    • Pratiquer un exercice physique régulier, par exemple une heure de marche quotidienne peut suffire.
  • Les médicaments de la constipation sont très nombreux, la plupart sont inutiles et dangereux
  • Les seuls médicaments à utiliser de façon exceptionnelle et jamais pendant longtemps lorsque la gêne est importante appartiennent à deux familles thérapeutiques :
    • Laxatifs de lest : mucilages, psyllium, sterculia, ispaghul
    • Laxatifs osmotiques : lactulose, sorbitol, macrogol
  • Il ne faut pas les utiliser s’il y a un risque d’occlusion intestinale
  • On peut aussi utiliser l’huile de paraffine, sauf s’il y a un risque de fausse route (personnes âgées)

IV/ Espace d'éducation et de progrès

  • Il peut exister 4 complications rares
    • La maladie des laxatifs : assez rare
    • La fausse diarrhée : relativement fréquente
    • Le fécalome : très rare
    • L’occlusion intestinale : pratiquement jamais
  • La maladie des laxatifs
    • Maladie grave et invalidante due à la phobie de la constipation et à l’abus de laxatifs irritants
    • Les symptômes sont divers et nombreux : douleurs, anorexie, déshydratation, soif, météorisme, perte de sels minéraux, vomissements, etc.
    • Le traitement est difficile
      • Suppression totale des laxatifs
      • Soutien psychologique ou traitement psychiatrique
    • Les laxatifs irritants, stimulants et dangereux sont nombreux : hydroxyde de magnésium, phosphate de sodium, docusate de sodium, picosulfate de sodium, bisacodyl, anthraquinone, bourdaine, séné, cascara, oxyphenisatine, bisacodyl, dantron, phenolphtaléine, huile de ricin, glycosides de séné, bisoxatin, prucalopride, etc.
  • La fausse diarrhée 
    • Selles liquides ou semi-liquides éliminées massivement après expulsion spontanée d’un bouchon, provoquant une véritable « débâcle intestinale ».  
  • Le fécalome
    • Lorsque le bouchon rectal ne peut plus être éliminé naturellement
    • Il faut alors recourir à des lavements huileux suivis d’une extraction manuelle.
  • Occlusion intestinale
    • Arrêt complet des matières et des gaz
    • Exceptionnellement due à la constipation, voire jamais.
    • Plus fréquentes chez des grabataires et en fin de vie
    • Peut survenir sur des adhérences après chirurgie abdominale ou à cause d’une tumeur
  • Les constipations-symptômes : la constipation peut être le symptôme d’autres maladies digestives ou non digestives
    • Maladies digestives : cancer du côlon, diverticulose sigmoïdienne et sigmoïdite diverticulaire, adhérences post-chirurgie ou post-radiothérapie, éventration, hémorroïdes (rarement).
    • Chez le jeune enfant, il faut penser au mégacôlon congénital (rare)
    • Maladies non digestives : hypothyroïdie, Parkinson, paraplégie, sclérose en plaques, etc.
  • La constipation provient assez souvent de la prise de médicaments : anti-acides à base de gel d’alumine, opiacés, neuroleptiques, antidépresseurs, antitussifs à base de codéine, inhibiteurs calciques, antiparkinsoniens, amiodarone, diurétiques, fer, etc.

V/ Radio trottoir des erreurs quotidiennes

  • Je ne risque rien, car je prends des médicaments naturels et des tisanes pour traiter ma constipation. Attention aux laxatifs « naturels », aux compléments alimentaires de fibres et aux tisanes, car ils cachent très souvent des laxatifs irritants et stimulants. Il faut regarder attentivement la composition, car le commerce du « naturel », hors prescription médicale est très souvent « tricheur ».
  • Si les médicaments sont en vente libre en pharmacie, c’est qu’ils ne sont pas dangereux. Grave erreur, les médicaments en vente libre sont souvent bien plus dangereux dans le domaine de la constipation. La vente libre permet la publicité à la télévision et augmente le poids des lobbys. Le marché ne se soucie pas de votre santé.
  • Mais alors pourquoi des médicaments dangereux restent en vente libre ? L’alcool et le tabac sont aussi en vente libre. Il faut répéter que l’on ne doit pas se traiter seul pour la constipation.
  • Je me traite car j’ai peur d’une occlusion intestinale. L’occlusion intestinale ne survient jamais après une constipation, sauf chez les personnes très âgées ou alitées.
  • Je redoute d’avoir un bouchon qui ne sorte plus. Les fécalomes sont exceptionnels. Pour les éviter, il ne faut pas se retenir en cas de besoin, il faut boire abondamment et faire de l’exercice.
  • J’ai peut-être un cancer du côlon. Si la constipation survient après 40 ou 50 ans et que vous n’étiez pas constipé auparavant, il faut effectivement vérifier s’il n’y a pas une maladie digestive ou autre.

Bibliographie

Le Bourgeois P
Constipation
Question d'internat

Prescrire rédaction
Constipation chez un adulte - L'essentiel sur les soins de premier choix
Revue Prescrire, Mai 2017, T 37, N° 403, pp 365-369

 

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La phrase biomédicale aléatoire

Il apparaît que définir la physiologie comme la science des lois ou des constantes de la vie normale ne serait pas rigoureusement exact, pour deux raisons. D'abord parce que le concept de normal n'est pas un concept d'existence, susceptible en soi de mesure objective. Ensuite, parce que le pathologique doit être compris comme une espèce du normal, l'anormal n'étant pas ce qui n'est pas normal, mais ce qui est un autre normal. Cela ne veut pas dire que la physiologie n'est pas une science. Elle l'est authentiquement par sa recherche de constantes et d'invariants, par ses procédés métriques, par sa démarche analytique générale. Mais s'il est aisé de définir par sa méthode comment la physiologie est une science, il est moins aisé de définir par son objet de quoi elle est la science. La dirons-nous science des conditions de la santé ? Ce serait déjà, à notre avis, préférable à science des fonctions normales de la vie, puisque nous avons cru devoir distinguer l'état normal et la santé. Mais une difficulté subsiste. Quand on pense à l'objet d'une science, on pense à un objet stable, identique à soi. La matière et le mouvement, régis par l'inertie, donnent à cet égard toute garantie. Mais la vie ? N'est-elle pas évolution, variation de formes, invention de comportements ? Sa structure n'est-elle pas historique autant qu'histologique ? La physiologie pencherait alors vers l'histoire qui n'est pas, quoi qu'on fasse, science de la nature. Il est vrai qu'on peut n'être pas moins frappé du caractère de stabilité de la vie. Tout dépend en somme, pour définir la physiologie, de l'idée qu'on se fait de la santé.
― Georges Canguilhem

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