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Grippe et syndromes grippaux

dernière mise à jour le 26/04/2020

I/ Les mots et les faits

  • Grippe : maladie virale survenant sur le mode épidémique
  • Influenza : nom du virus de la grippe
  • Influenza est aussi le nom donné à la grippe en langue anglaise
  • Pandémie : nom donné à une épidémie non limitée dans l’espace et qui se répand rapidement à toute la surface du globe.
  • Épidémies saisonnières : épidémies survenant seulement à certaines saisons dans les pays tempérés (en hiver pour la grippe)
  • Syndrome grippal : les médecins ont pris l’habitude de nommer ainsi tout ce qui ressemble à une grippe mais qui n’en est peut-être pas une.
  • Les virus de la grippe contaminent l’homme et de nombreuses espèces animales sauvages et domestiques depuis toujours.
  • Le virus de la grippe comprend 4 souches ou types : A, B, C, D. Seul le type A est dangereux pour l’espèce humaine
  • Quelques chiffres annuels pour la France
    • De 2 à 8 millions de grippe ou syndrome grippaux
    • 75 000 passages aux urgences
    • 3000 passages en réanimation
    • De 2000 à 15 000 décès (dont 90% de personnes âgées)

II/ Combattre les idées reçues

  • Le diagnostic est difficile à affirmer en dehors des épidémies saisonnières, car la grippe ressemble à beaucoup d’infections virales.
  • Chez l’adulte, le virus de la grippe est très rarement mortel en lui-même
    • Il ne tue pas les personnes en bonne santé, même si elles sont âgées
    • Il tue les personnes âgées si elles ont déjà d’autres pathologies qui les fragilisent
    • La grippe provoque souvent l’aggravation de maladies préexistantes (cardiaques, pulmonaires, neurologiques)
    • Chez les adultes et personnes âgées fragiles, ce sont les complications bactériennes qui tuent (essentiellement des pneumopathies).
    • Par exemple, en 1918, 95% des 50 millions de morts ont succombé à des pneumopathies (essentiellement dues au pneumocoque)
  • Chez les nourrissons de moins de 6 mois
    • Le virus tue plus que la coqueluche ou la pneumonie à pneumocoque
    • La grippe peut être directement mortelle par évolution fulminante en moins d’une semaine, même chez des nourrissons en bonne santé apparente.
    • Mais dans plus de la moitié des cas, ce sont des nourrissons déjà fragiles
  • Chez les enfants, la mort peut survenir comme chez l’adulte
    • Par une surinfection bactérienne
    • Par exacerbation d’une maladie préexistante
    • 20 % des cas mortels surviennent chez des enfants vaccinés (fragiles).
    • La plupart des médicaments sont soit inutiles soit dangereux.
    • Seules les complications doivent être traitées

III/ Les idées forces

Les symptômes et signes cliniques

  • Les signes cliniques de la maladie ne sont pas toujours discriminants
  • Les signes les plus évocateurs de la grippe sont
    • Le début brutal des symptômes – Les patients peuvent parfois préciser la minute où ils sont « tombés » malades
    • La forte fièvre – généralement supérieure à 38,5° et jusqu’à plus de 40°
    • Particulièrement une fièvre dite « en V », c’est-à-dire qui remonte après un ou deux jours de baisse.
    • Lorsque les symptômes surviennent après 65 ans
  • Des symptômes sont fréquents, mais moins évocateurs  
    • Frissons parfois intenses
    • Douleurs musculaires (myalgies) et courbatures
  • D’autres symptômes ne sont pas discriminants, car ils sont présents dans plusieurs maladies virales et bactériennes des voies aériennes
    • Toux
    • Maux de tête
    • Écoulement nasal et maux de gorge
    • Sensation de malaise
  • Finalement, le meilleur critère pour confirmer le diagnostic de grippe est la survenue de ces symptômes en période d’épidémie confirmée par les réseaux de surveillance de la grippe

Syndrome grippaux

  • Ils sont théoriquement moins forts qu’une vraie grippe
  • Mais pratiquement les symptômes sont les mêmes (fièvre, courbature, maux de tête)
  • Le début est généralement moins brutal
  • Ils surviennent aussi le plus souvent en hiver
  • Ils peuvent survenir pendant une épidémie de grippe, rendant le diagnostic difficile, voire impossible
  • Les virus responsables sont nombreux, les plus connus sont : virus respiratoire syncytial (VRS), rhinovirus, virus parainfluenza, adenovirus, coronavirus, métapneumovirus.
  • On estime grossièrement que près de la moitié des grippes diagnostiquées sont en réalité des syndromes grippaux.
  • Notons enfin que dans 80% des cas de grippe, les prélèvements montrent également la présence d’autres virus.

La transmission

  • Le virus peut survivre
    • 1 à 2 jours sur les surfaces dures
    • ½ journée sur les vêtements et mouchoirs
    • 5 minutes sur les mains !
  • La contamination se fait
    • En touchant les autres après s’être touché le nez ou la bouche
    • Par la respiration, la toux et les écoulements
    • Et souvent par les mains (d’où l’importance du lavage )
  • Une personne atteinte contamine en moyenne de 1 à 3 personnes sur 10 dans son entourage.

Les complications

  • Les personnes les plus exposées aux complications graves sont 
    • Les femmes enceintes surtout au 3° trimestre de la grossesse
    • Les nourrissons de moins de 6 mois
    • Les immunodéprimés
    • Les patients âgés et fragiles
    • Les obèses morbides (IMC > 40)
  • Les signes et symptômes d’alerte des complications sont
    • Fièvre de plus d’une semaine ou récidivante au-delà d’une semaine
    • Difficulté respiratoire (dyspnée)
    • Cyanose (teint violet des extrémités et des yeux)
    • Convulsions
    • Crachats purulents
    • Symptômes méningés : photophobie (peur de la lumière) et raideur de la nuque
    • Paresthésies (divers troubles du toucher et sensations cutanées)
    • Troubles du système nerveux autonome (rétention urinaire, hyper ou hypotension, troubles du rythme cardiaque)
  • Les complications les plus fréquentes sont :
    • Chez l’adulte : pneumonies et exacerbation de bronchite,
    • Chez l’enfant : otite moyenne aiguë et exacerbation d’asthme.
  • Certaines complications sont très rares
    • Péricardite, myocardite et infarctus du myocarde
    • Encéphalopathies, syndrome de Guillain Barré, Syndrome de Reye, méningites aseptiques
    • Rhabdomyolyse (destruction du tissu musculaire)
  • Lorsque la grippe survient chez une femme enceinte, cela augmente le risque de fausses couches et de complications de l’accouchement
  • Il y a aussi des répercussions chez le nouveau-né, surtout lorsque la grippe a eu lieu au premier trimestre :
    • Plus d’hospitalisations, plus de prématurés
    • Score d’Apgar plus faible (moindre vitalité du nouveau-né)

Traitement

  • La grippe guérit en moins d’une semaine et ne nécessite aucun traitement spécifique.
  • Pour soulager les symptômes et limiter les complications, il est important de boire abondamment (toutes boissons chaudes ou glacées, à l’exclusion de l’alcool !).
  • On peut aussi humidifier l’air de la pièce
  • En cas de forte fièvre, il faut utiliser exclusivement le paracétamol (maximum 4 gr / 24h) chez l’adulte.
  • Il ne faut pas utiliser l’aspirine chez l’enfant en raison du risque de syndrome de Reye
  • Il ne faut pas utiliser les antiinflammatoires (AINS) en raison de leur toxicité gastrique et rénale
  • Les antitussifs sont inutiles chez l’adulte et dangereux chez l’enfant.
  • Les adultes peuvent éventuellement utiliser le dextromethorphane en cas de forte toux (sauf les femme allaitant)

Traitements inutiles et/ou dangereux

  • Les antibiotiques sont inutiles, car il s’agit d’une maladie virale
  • L’amantadine est inefficace
  • Les antiviraux inhibiteurs de la neuraminidase (oseltamivir, zanamivir) ne doivent pas être utilisés ni en préventif, ni en curatif, car ils ont un rapport bénéfices/risques négatif
  • Les antitussifs (pholcodine, pentoxyvérine), les antihistaminiques sédatifs et atropiniques (chlorphénamine, diphénhydramine, méquitazine, prométhazine), l’ambroxol et la bromhexidine ne servent à rien et certains présentent des risques.
  • Il ne faut pas utiliser d’antiinflammatoires, vasoconstricteurs et anesthésiques locaux (nez, gorge)
  • Tous les produits en sprays sont dangereux chez les nourrissons et jeunes enfants
  • Les dérivés terpéniques (camphre et menthol) sont dangereux chez les nourrissons

La vaccination

  • Elle a une efficacité faible pour une vaccination (environ 50% sur le nombre de cas)
  • Chez les adultes et les personnes âgées en bonne santé
    • Elle divise le nombre de cas par deux
    • Mais elle ne modifie ni les complications graves ni le nombre de jours d’arrêt de travail
  • Chez les personnes âgées et fragiles
    • Elle diminue les complications graves
    • Mais le vaccin est moins efficace en raison de la faiblesse du système immunitaire (qui vieillit aussi !).
  • Pour les femmes enceintes
    • La majorité des médecins pensent qu’il faut les vacciner en priorité
  • Pour les nourrissons et les enfants
    • Elle n’est pas pratiquée sauf chez les plus fragiles et les immunodéprimés
  • Bien évidemment, la vaccination ne diminue pas le nombre de syndromes grippaux !
  • Il existe des vaccins tri et tétravalents (nombre de sous-types HN)
  • En France, la vaccination est gratuite pour :
    • les personnes âgées et les personnes atteintes de certaines maladies chroniques
    • les femmes enceintes
    • les personnes immunodéprimées
    • les personnes obèses (IMC > 40)
  • Elle est conseillée pour les professionnels de santé, l’entourage familial des nourrissons, les accompagnateurs et le personnel navigant.
  • Un vaccin universel est actuellement à l’étude
    • Il cherche à cibler des antigènes non variables
    • Il ne serait injecté que tous les 5 ans
    • Mais il ne sera pas disponible avant longtemps pour diverses raisons

IV/ Espace d’éducation et de progrès

  • Le virus de la grippe est un virus à ARN de la famille des Orthomyxoviridae
  • Il comprend 4 types (souches) : A, B, C, D
    • Le type A
      • Il est le seul à provoquer des pandémies
      • Il est aussi responsable d’épidémies saisonnières
      • C’est le plus dangereux pour l’homme
      • Il infecte aussi les oiseaux et un grand nombre d’espèces de mammifères
    • Le type B
      • Il ne donne que des épidémies saisonnières
      • Il infecte quasi-exclusivement l’homme
      • Il est beaucoup moins dangereux
    • Le type C ne donne que des maladies et symptômes bénins
    • Le type D est très rare et concerne essentiellement les bovins
  • Les virus A et B portent deux protéines antigéniques (antigènes) remarquables : l’hémagglutinine et la neuraminidase
    • Seuls les virus A contribuent à la classification HN
      • 18 hémagglutinines (H) nommées de H1 à H18
      • 11 neuraminidases (N) nommées de N1 à N11
    • Les virus B sont simplement divisés en deux lignées : Yamagata et Victoria.

Les pandémies

  • Une pandémie résulte de l’apparition d’un nouveau sous-type de virus de type A (par mutation), et pour lequel la majorité de la population n’a donc pas encore de protection immunologique.
  • Voici les grandes pandémies répertoriées :
    • 1918 : dite « grippe espagnole », sous-type H1N1, 50 millions de morts
    • 1957 : dite « grippe asiatique », sous-type H2N2, 2 millions de morts
    • 1969 : dite « grippe de Hong Kong », sous-type H3N2, 1 million de morts
    • 1977 : dite « grippe Russe », sous-types H3N2 et H1N1 réintroduit
    • 2009 : dite « grippe porcine », nouveau variant de sous-type H1N1 par échanges avec un virus aviaire et deux virus porcins.
    • Ces deux dernières épidémies ont été très médiatisées, mais peu mortelles. Les 2 sous-types : le H3N2 et le H1N1 modifié sont désormais présents dans tous les vaccins.

Épidémies saisonnières

  • Elles débutent à la fin de l’automne ou au début de l’hiver
  • Elles durent de 4 à 12 semaines
  • Elles entrainent des arrêts de travail de 4 à 5 jours
  • Elles peuvent désorganiser la vie économique et sociale.
  • Elles sont surveillées par un « réseau sentinelle » de 1300 généralistes

Grippes zoonotiques

  • On parle de grippe zoonotique lorsqu'un humain est exceptionnellement contaminé par un virus non humain
    • grippe aviaire lorsque c'est un virus d'oiseau (ex. poulet)
    • grippe porcine lorsque c'est un virus spécifique du porc
    • ce sont le plus souvent des animaux d'élevage
  • Ces infections zoonotiques peuvent être bénignes (ex : virus porcin H3N2 ou aviaire H9N2)
  • Elles sont parfois graves (ex : virus aviaires H5N1, H7N9, H5N6).
  • Ces virus ne se transmettent généralement pas d’homme à homme
  • La grande crainte est évidemment de voir ces virus muter et permettre une transmission interhumaine.

V/ Radio trottoir des erreurs quotidiennes

  • J’ai la grippe, au moins une ou deux fois par an. Non, il s’agit probablement de rhino-pharyngites ou de syndromes grippaux, beaucoup moins graves.
  • Peut-on attraper la grippe chaque année ? Non, en principe, si le virus ne mute pas, on est immunisé pendant au moins 10 ans après avoir eu une vraie grippe. Mais on peut avoir des syndromes grippaux chaque année.
  • Alors, pourquoi se faire vacciner chaque année ? Effectivement, s’il n’y a pas de nouveau sous-type de virus, une vaccination tous les 5 ans pourrait suffire. Mais il y a une forte pression des autorités pour ce vaccin, pour diverses raisons tant économiques, car les épidémies saisonnières désorganisent la société, que sanitaires, car la mortalité reste élevée chez les personnes âgées.
  • Pourquoi vaccine-t-on les personnes âgées si le vaccin est peu efficace chez elle et si leur mortalité ne diminue pas ? Le vaccin semble tout de même diviser par deux le nombre de cas sans réellement diminuer le nombre de complications mortelles. Vous avez en partie raison, les personnes âgées ne sont pas la meilleure cible ; il est préférable de vacciner les femmes enceintes, l’entourage des nourrissons et le personnel soignant
  • Pourquoi a-t-on si peur de la grippe aviaire ? Les grippes aviaires ne sont pas toujours graves, et ne provoquent pas d’épidémies humaines. Cependant, on redoute une mutation virale pouvant provoquer une épidémie avec un nouveau sous-type. Il est certain que la médiatisation excessive de ces grippes dans le but d’effrayer et de majorer les vaccinations est une sorte de malhonnêteté intellectuelle et scientifique puisque nous n’aurions pas le temps de fabriquer un nouveau vaccin avant que cette nouvelle grippe n’ait fini son tour du monde. Les autorités redoutent d’être accusées de n’avoir rien fait, alors qu’en réalité elles ne pourraient effectivement rien faire !
  • On dit que même un enfant en bonne santé peut en mourir. C’est vrai, mais il ne faut pas trop exagérer. C’est certainement vrai pour les nourrissons de moins de 6 mois, mais cela reste tout de même exceptionnel chez les enfants et jeunes adultes ayant une bonne santé et une bonne hygiène de vie.
  • Pourquoi le vaccin n’est-il pas gratuit ou obligatoire pour tous ? Voilà une question bien embarrassante. Il faut admettre qu’il existe encore beaucoup de controverses et d’inconnues sur l’efficacité réelle de ce vaccin. Une chose est certaine c’est qu’il n’a pas fait disparaître la grippe. Il est donc impossible de le rendre obligatoire comme d’autres vaccins qui ont fait disparaître la maladie correspondante. La gratuité existe pour les personnes qui en ont le plus besoin.
  • On dit que ce vaccin provoque des maladies auto-immunes. On a dit cela pour absolument tous les vaccins. Comme plusieurs vaccins, il peut provoquer une syndrome de Guillain Barré (1 à 2 cas pour 1 million de vaccinations). Enfin l’adjuvant AS03 contenu dans certains vaccins antigrippaux (Pandemrix) semble augmenter le risque de narcolepsie (la fréquence passe de 1/100 000 à 2 ou 3/100 000). Il n’y a aucun autre risque avéré.
  • Alors pourquoi y a-t-il une réelle suspicion contre ce vaccin en France. Notre pays souffre à la fois d’une mauvaise communication des autorités et d’une puissance de contestation hors du commun. Il faut aussi bien reconnaître que ce vaccin est peu efficace en regard des autres vaccins. Enfin les français ne sont pas dupes des pressions grossières de l’industrie pharmaceutique autour de ce vaccin annuel très rentable. C’est très dommageable, car cela peut nuire à d’autres vaccinations réellement indispensables. Laissons aller notre bon sens et acceptons ce vaccin imparfait en attendant mieux.

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Prescrire rédaction
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― Lionel Naccache

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