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Crédibilité des hypothèses sur l'origine des traits humains

dernière mise à jour le 10/01/2024

ABSTRACT

Diverses hypothèses ont été proposées pour expliquer l’origine des traits distinguant les humains des autres primates. Chaque trait peut être expliqué comme une adaptation à différents environnements ou comme le résultat d'exigences de l'organisation sociale ou encore par la sélection sexuelle. Pour connaître la popularité des différentes explications, cette enquête résume les réponses de 1266 scientifiques pertinents en paléoanthropologie, paléontologie, écologie, biologie de l’évolution et biologie humaine. Aucune des hypothèses n’a été universellement acceptée ou rejetée. Même les hypothèses les plus populaires ont été jugées « très probables » par moins de 50 % des répondants. De nombreux traits comportaient 1 à 3 hypothèses qui ont été jugées au moins modérément probables par plus de 70 % des répondants. Un classement des hypothèses a identifié deux forts gradients. Dans le premier gradient, les hypothèses ont été classées selon leur popularité, mesurée par le score de crédibilité moyen attribué par les répondants. Le deuxième gradient séparait toutes les hypothèses postulant une adaptation à la natation ou à la plongée. Les scores de crédibilité moyens attribués aux différents sous-groupes d'hypothèses n'étaient pas liés à l'âge du répondant ou au nombre de ses publications. Cependant, les paléoanthropologues étaient plus critiques à l’égard de toutes les hypothèses, et beaucoup plus critiques à l’égard de celles liées à l’eau. Même si la plupart des personnes interrogées n'ont pas trouvé les hypothèses liées à l'eau probables, seule une petite minorité les a jugées non scientifiques. Les hypothèses les plus populaires étaient fondées sur des facteurs inhérents, supposant que l'évolution d'un trait avait été déclenchée par l'émergence préalable d'un autre trait comportemental ou morphologique spécifique à l'homme, mais les opinions divergeaient quant à savoir lequel de ces traits venait en premier.

 

INTRODUCTION

L’évolution humaine est un sujet qui intéresse non seulement les chercheurs spécialisés en paléoanthropologie, mais aussi d’autres scientifiques et le grand public. Un certain nombre d’hypothèses contradictoires ont été avancées pour expliquer pourquoi les humains sont devenus si différents des autres primates. La plupart des scientifiques dans des domaines pertinents tels que la paléoanthropologie, la paléontologie, l'écologie, l'évolution et la biologie humaine n'ont jamais publié leurs points de vue sur les moteurs de l'évolution humaine en général, ni sur laquelle des hypothèses proposées sur l'origine de traits humains spécifiques leur parait la plus justifiée. Aucun résumé récent de l’opinion dominante parmi les paléoanthropologues n’a été publié non plus, de sorte qu’il existe une incertitude quant à savoir si les scientifiques s’accordent ou non sur les forces motrices de l’évolution humaine. 

Les humains diffèrent des 400 autres espèces de primates à bien des égards, les plus frappants étant qu'ils marchent complètement debout sur leurs pattes postérieures, qu'ils ont un cerveau inhabituellement gros et qu'ils ont une peau nue plutôt que recouverte de fourrure. Parmi les autres caractéristiques typiquement humaines chez les primates figurent la descente du larynx, la parole articulée et la capacité d’accumuler de la graisse dans une épaisse couche sous-cutanée.

Un certain nombre d'hypothèses contradictoires ont été proposées pour expliquer pourquoi ces traits sont apparus dans la lignée menant aux humains, mais dans les autres lignées de primates. Nous savons que les espèces animales s’adaptent à leur environnement par sélection naturelle : les traits qui confèrent à l’animal une probabilité plus élevée de survie et de reproduction deviennent plus courants avec le temps et les traits liés à des taux de survie et de reproduction plus faibles deviennent moins nombreux. Les traits adaptatifs sont souvent morphologiques (comme de longues pattes qui augmentent la vitesse de course et l’échappement aux prédateurs, ou une fourrure épaisse qui protège du froid), mais ils peuvent aussi être comportementaux (comme construire un nid ou avoir une vie nocturne). 

Les ancêtres des humains sont venus vivre dans un type d’environnement différent de celui des ancêtres des chimpanzés et des gorilles, et se sont adaptés en développant une série de traits nouveaux. L'une des premières propositions allant dans ce sens, déjà suggérée par Lamarck et Darwin, était que les ancêtres humains sont descendus des arbres et se sont déplacés vers la savane ouverte ; les publications sur ce point sont très nombreuses. Étant donné que la vie terrestre dans la savane sèche est très différente de la vie arboricole dans les forêts humides, ce changement d'habitat aurait modifié les pressions de sélection dominantes : les traits qui étaient adaptatifs dans l'ancien environnement pouvaient être inadaptés dans le nouveau, et de nouveaux traits pouvaient être favorisés s’ils donnaient une meilleure chance de survie et de reproduction. Les grands singes, étant restés dans la forêt, sont donc restés plus semblables aux autres primates.

Le scénario de la savane a perdu un peu de son attrait depuis que les reconstructions paléo-environnementales ont commencé à montrer que le contexte environnemental était plus complexe qu'on ne le pensait initialement. Des récits plus récents décrivent l'environnement des premiers ancêtres humains comme une mosaïque de zones boisées, de savanes et de plans d'eau avec des fluctuations temporelles considérables entre les périodes climatiques arides et humides. Il a également été proposé que la grande variabilité environnementale pendant l’hominisation ait pu sélectionner en elle-même une véritable polyvalence des adaptations.

Différents aspects de la vie terrestre ont pu nécessiter les changements morphologiques de la lignée humaine, c'est pourquoi un grand nombre d'explications différentes ont été avancées pour chaque trait. Par exemple, l'origine de la démarche bipède a été attribuée (entre autres) à l'obtention d'une meilleure visibilité en savane, à la recherche de nourriture sur les branches basses, à la collecte de petits aliments sur les arbres et le sol. Ou encore que cette bipédie expose une plus petite partie du corps au soleil brûlant, elle permet des déplacements sur de longue distance plus économes en énergie, elle libère les mains pour transporter de la nourriture, des outils, des armes ou des bébés. Il a également été proposé que la bipédie trouve déjà son origine dans les arbres pour la marche appuyée sur de petites branches trop faibles pour la brachiation.

Une autre proposition suggère que les ancêtres humains se sont déplacés des arbres vers le bord de l'eau et ont commencé à s'adapter à un mode de vie en partie aquatique. Cela les aurait exposés à des pressions de sélection similaires à celles des mammifères semi-aquatiques, plutôt qu'aux pressions de sélection généralement subies par d'autres primates. Dans ce scénario, une démarche bipède serait apparue car elle permettait de patauger vers des eaux plus profondes et rendait le corps plus apte à la nage et à la plongée pour se nourrir.

Cependant, tous les traits ne sont pas nécessairement adaptatifs pour améliorer la survie. On sait par exemple que la sélection sexuelle a produit de nouveaux traits spectaculaires chez divers animaux, généralement des ornements dont le seul but est d'attirer l'attention du sexe opposé. Ceux-ci ne confèrent aucun avantage de survie ou peuvent même être nocifs pour le porteur. La bipédie humaine, la nudité et la couche graisseuse sous-cutanée sont quelques exemples de traits proposés comme résultant du mécanisme de la sélection sexuelle. Enfin et surtout, dans de petites populations, certains traits peuvent même émerger en raison de la fixation fortuite d'une variation aléatoire.

Pour quelqu’un qui s’intéresse au « pourquoi » de l’évolution humaine, il est actuellement difficile de trouver un compte rendu complet de l’état de l’art scientifique. Les articles de revues n'abordent généralement qu'une ou quelques hypothèses indépendamment des autres et se concentrent souvent davantage sur le « comment » que sur le « pourquoi » de l’apparition d’un trait donné. Seuls les partisans de l’hypothèse du singe aquatique (connue sous l’abréviation AAH) soutiennent qu'il est possible d'expliquer la plupart des traits typiquement humains comme une réponse adaptative, mais ils trouvent peu d'écho dans les revues paléoanthropologiques. En effet, l’AAH a été très contestée et accusée d’être une hypothèse générale qui tente de tout expliquer, de manquer de parcimonie et de preuve ; elle a même été traitée de pseudoscience.

Nous analysons ici les résultats de cette enquête cherchant à découvrir ce que pensent réellement les scientifiques sur les raisons pour lesquelles certains des traits humains les plus frappants sont apparus. 

 

MÉTHODES

1/L’enquête

L’enquête a permis d’indiquer si l’une des hypothèses proposées pour expliquer l’origine évolutive d’un trait humain spécifique est universellement acceptée ou rejetée. Même si ce n’est pas toujours le cas, l’enquête donne une indication des hypothèses les plus ou les moins populaires.

L’enquête énumérait quinze traits humains (comme la bipédie) et demandait aux personnes interrogées d'évaluer la crédibilité de 51 hypothèses proposées pour expliquer leur origine évolutive (comme libérer les mains pour utiliser des outils ou voir au-dessus des herbes hautes). La notation de la crédibilité a été effectuée à l'aide d'une échelle de cinq points :

1 : très improbable

2 : modérément improbable

3 : sans opinion

4 : modérément probable

5 : très probable. 

Le nombre d'hypothèses alternatives considérées était de dix pour la bipédie et la taille du cerveau, huit pour l'absence de poils, sept pour la parole, quatre pour la graisse sous-cutanée et trois pour la descente du larynx. De plus, il y avait neuf traits pour lesquels une seule explication a été proposée dans la littérature, et celle-ci était liée à l'hypothèse du singe aquatique (AAH) pour laquelle nous avons demandé l’opinion sur les critiques contre cette hypothèse. 

 

2/ Analyses de données

Pour un meilleur échantillonnage, les experts ont été séparés en quatre groupes. 

  • Paléoanthropologues regroupant paléoanthropologie, anthropologie et archéologie
  • Biologistes regroupant physiologie, anatomie ou morphologie animales, écologie, évolution, génétique ou biologie moléculaire.
  • Biologistes humains regroupant tous les sous-domaines (cardiovasculaire, respiratoire, musculosquelettique, neurologie, nutrition, etc.). 
  • Autres regroupant géologie, paléontologie et divers.

 

 

RÉSULTATS

L'analyse a révélé des tendances claires parmi les hypothèses proposées pour expliquer l'origine évolutive de traits humains spécifiques. La caractéristique la plus frappante est la séparation en deux groupes. Le plus petit groupe contient toutes les hypothèses qui évoquent l'adaptation à la natation ou à la plongée comme facteur explicatif de l'émergence d'un trait, et le plus grand groupe contient toutes les autres hypothèses, qu'elles fassent référence à l'adaptation à un environnement spécifique ou à des besoins qui émergent d'un comportement spécifique. Le premier a été nommé groupe de l’AAH et le second groupe des zones arides.

Le tableau 1 résume les principales hypothèses pour les principaux traits humains

Bipédie
Efficacité énergétique Permet de parcourir de longues distances à moindre coût énergétique.
Branches fines Dans la canopée, elle facilite l'utilisation de plusieurs supports (comme chez les orangs-outans) et permet de se déplacer sur des branches plus fines qu'avec la brachiation ou la quadrupédie.
Patauger Dans un habitat littoral, marcher debout permet de patauger dans des eaux plus profondes avec les narines au-dessus de la surface (les singes traversent les plans d'eau de manière bipède), et la même posture rationalise la nage et la plongée (comme chez les manchots).
Thermorégulation Marcher debout aide à la thermorégulation dans la savane en exposant moins de peau au soleil de midi et plus de peau au vent rafraîchissant.
Meilleure vision Marcher debout permet de voir au-dessus de l'herbe de la savane et donc de repérer le danger de plus loin.
Recherche de nourriture Marcher debout rend la recherche de nourriture plus efficace, car les mains ne sont pas nécessaires pour la locomotion.
Transport de nourriture Marcher debout permet au mâle de transporter plus facilement des aliments de haute qualité, comme de la viande, vers la femelle et les nourrissons.
Portage du bébé Marcher debout permet à une femelle de porter sa progéniture dans ses bras.
Utilisation des outils Marcher debout facilite l’utilisation des outils et des armes.
Sélection sexuelle La position debout est favorisée par la sélection sexuelle, car elle rend les organes génitaux plus visibles.
   
Gros cerveau (encéphalisation)
Viande Un changement de régime alimentaire vers une consommation accrue de viande déclenche une encéphalisation, car la viande est riche en énergie.
Poisson Un changement de régime alimentaire vers une consommation accrue de poisson et d'autres fruits de mer déclenche l'encéphalisation, car les fruits de mer sont riches à la fois en énergie et en acides gras oméga-3 qui sont un composant essentiel du tissu cérébral.
Cuisine L'utilisation du feu déclenche l'encéphalisation, car la cuisson augmente la valeur nutritionnelle des aliments végétaux.
Social Une organisation sociale complexe entraîne une pression en faveur d’une plus grande intelligence et déclenche donc l’encéphalisation.
Chasse La chasse collaborative entraîne une pression pour une plus grande intelligence et déclenche donc l'encéphalisation.
Langue La langue parlée provoque une pression pour une plus grande intelligence et déclenche donc l'encéphalisation.
Guerre La guerre provoque une pression pour une plus grande intelligence et déclenche donc l'encéphalisation.
Néoténie L'encéphalisation est un effet secondaire de la néoténie (la rétention des caractéristiques juvéniles à l'âge adulte), qui est avantageuse lorsque la morphologie de l'adulte est devenue inadaptée à un nouvel environnement.
Bipédie L'encéphalisation est déclenchée par la bipédie, qui modifie la circulation sanguine et fournit un mécanisme de refroidissement pour le cerveau plus gros.
Nudité L'encéphalisation est déclenchée par la nudité, qui fournit un mécanisme de refroidissement au plus gros cerveau.
   
Nudité
Contact cutané bébé Le contact direct peau à peau renforce le lien émotionnel entre une femelle et sa progéniture allaitée.
Sexuel Le contact direct peau à peau rend les rapports sexuels plus agréables et est favorisé par la sélection sexuelle.
Propreté Chez les animaux qui se nourrissent de charognes, la peau nue reste plus propre que la peau velue (ou la peau couverte de plumes comme chez les vautours).
Ectoparasites Chez les mammifères qui vivent dans des nids permanents, la peau nue permet d’éviter une charge élevée d’ectoparasites.
Theromrégulation et nage Chez les mammifères qui vivent en partie ou entièrement dans l'eau, la fourrure ralentit la nage, mais ne parvient pas à fournir une isolation efficace lorsqu'elle est mouillée (par exemple : morse, hippopotame, dauphins).
Surchauffe Chez les mammifères qui chassent dans la savane, la peau nue dissipe plus efficacement la chaleur et réduit le risque d'échauffement.
Taille du corps Les grands mammifères peuvent réguler leur température corporelle sans nécessité de fourrure, et les humains sont relativement grands par rapport aux autres primates.
Vêtements L’usage des vêtements a rendu la fourrure inutile.
   
Graisse sous cutanée
Approvisionnement en énergie La graisse sous-cutanée peut stocker de l’énergie en cas de pénurie alimentaire et, chez les nourrissons, elle assure le développement du gros cerveau.
Flottabilité et thermoregulation Dans des conditions humides, la graisse sous-cutanée offre une isolation plus efficace que les poils et facilite la nage en augmentant la flottabilité.
Thermoregulation en savane La graisse sous-cutanée est une adaptation à la thermorégulation de la savane, au même titre que la nudité et la transpiration.
Sélection sexuelle La graisse sous-cutanée adoucit la forme du corps et son évolution est régie par la sélection sexuelle.
   
Larynx descendu
Articulation La parole articulée nécessite un larynx descendu, car cela permet de produire une plus grande variété de sons.
Sélection sexuelle Un larynx descendu rend la voix plus forte et plus impressionnante et peut évoluer par sélection sexuelle (ex : les cerfs mâles).
Plongée Un larynx descendu peut évoluer comme une adaptation à la plongée (comme chez certains mammifères aquatiques), car il permet de fermer les voies aériennes sous l'eau et d'inspirer rapidement par la bouche en faisant surface.
   
Parole
Descente du larynx La parole est déclenchée par le larynx descendu, ce qui permet d'émettre une plus grande variété de sons.
Plongée La parole nécessite un contrôle volontaire de la respiration, qui peut évoluer en tant qu'adaptation à la plongée. Dans l'eau, les signaux visuels et olfactifs sont inadéquats et sont donc susceptibles d'être remplacés par une communication vocale (comme chez les baleines).
Bipédie La parole nécessite un contrôle volontaire de la respiration, qui peut évoluer une fois que la bipédie libère la respiration de la contrainte posée par la mécanique de la locomotion.
Réassurance La parole permet aux femelles de rassurer leur progéniture inquiète pendant qu'elle se nourrit.
Social La pression sociale nécessite une communication plus élaborée en faveur de la parole.
Chasse La chasse collective nécessite un moyen de communication efficace.
Culture La transmission culturelle d'une génération à l'autre nécessite un moyen de communication efficace (par exemple, comment faire face à de graves sécheresses)
   
Traits de l'hypothèse du singe aquatique
Bébé nageur Les bébés humains peuvent nager bien avant de pouvoir marcher. Ils sont à l’aise dans l’eau et capables de retenir leur souffle lorsqu’ils sont immergés.
Nez Contrairement aux singes, les humains ont un nez arqué et des narines flexibles. Ceux-ci aident à empêcher l’eau de pénétrer dans les voies respiratoires lors de la plongée.
Odeur Les humains ont un odorat relativement faible, comme les mammifères aquatiques.
Palme Les humains ont une palme partielle entre les doigts et les orteils. Les pattes palmées sont courantes chez les animaux semi-aquatiques (comme les loutres et les canards), mais on ne les trouve pas chez les primates non humains.
Glandes eccrines La sueur rafraîchissante est excrétée par les glandes eccrines chez l'homme, mais par les glandes apocrines chez les autres primates. Les glandes apocrines pourraient avoir perdu leur fonction de thermorégulation chez les ancêtres humains à une époque où le refroidissement par immersion remplaçait le refroidissement par la sueur.
Transpiration et eau Les humains transpirent plus abondamment que n’importe quel autre primate. Comme cela peut entraîner une perte mortelle d’eau et d’électrolytes en quelques heures, ce caractère a probablement évolué dans des conditions d’approvisionnement abondant en eau et en sel.
Plongée Comparés aux autres primates, les humains sont de meilleurs nageurs et peuvent plonger plus profondément et plus loin.
Apnée Le réflexe de plongée (ralentissement du rythme cardiaque et de la consommation d'oxygène dans l'eau) augmente la résistance du cerveau à l'apnée, et son ampleur chez les plongeurs humains est comparable à celle des mammifères semi-aquatiques tels que les loutres et les castors.
Amour du bain Comparés aux autres primates, les humains aiment particulièrement se plonger dans l’eau. Cela se manifeste par la popularité des baignade et vacances à la plage

Dans le groupe des zones arides, les scores de crédibilité ont été très élevés (4,08 à 4,26) pour les hypothèses les plus populaires pour 5 traits :

  • Couche adipeuse sous-cutanée (réserve d'énergie en particulier pour le cerveau en développement)
  • Descente du larynx (nécessaire pour la parole articulée)
  • Bipédie (utilisation d'outils et d'armes)
  • Parole (pression sociale pour une communication élaborée)
  • Gros cerveau (organisation sociale complexe).

Cette combinaison pourrait être le scénario global le plus populaire pour l'origine de ces traits, mais les 2 à 3 explications les plus populaires suivantes pour la bipédie (libérer les mains pour se nourrir, meilleure vue sur les herbes hautes), le gros cerveau (requis par le langage ou la chasse collaborative) et la parole (requise soit par la chasse collaborative, soit par la transmission culturelle et déclenchée par la descente du larynx) ont également reçu des scores de crédibilité élevés (3,53 à 3,96).  Les hypothèses expliquant l'absence de poils n'ont pas été jugées convaincantes par les personnes interrogées, car même les deux plus populaires (éviter la surchauffe lors de la chasse, éviter les ectoparasites) avaient des scores de crédibilité moyens de seulement 3,48 et 3,17.

Onze des douze hypothèses les plus populaires reposaient sur des facteurs inhérents à l’évolution, c’est-à-dire que les traits morphologiques émergeaient en réponse à une pression de sélection, soit à partir d’un comportement nouveau, soit à partir d’un trait morphologique préexistant. Les hypothèses basées sur la pression de sélection d’un nouveau type d’environnement externe étaient moins populaires, même au sein du groupe des zones arides. Et les scores de crédibilité de toutes les hypothèses du groupe AAH étaient faibles à intermédiaires (2,26-2,99). Les hypothèses selon lesquelles l’encéphalisation aurait été déclenchée par une meilleure nutrition ont également reçu des scores de popularité intermédiaires, qu’ils soient obtenus par la cuisine ou par une consommation accrue de poisson ou de viande (tous trois avec des scores de crédibilité compris entre 2,61 et 2,77). Les quatre hypothèses les moins populaires de toutes (scores de crédibilité de 1,95 à 2,20) étaient fondées sur des facteurs inhérents opérant sur la terre ferme.

Il apparaît que la crédibilité des hypothèses liées à l'eau était appréciée différemment de la crédibilité des autres hypothèses. 

 

La position des répondants ne semblait pas être liée à leur expérience scientifique en général, mesurée par le nombre total de leurs publications, mais elle était liée à ce qu'ils connaissaient sur l'évolution humaine. 

L'effet de loin le plus important sur les réponses était celui du domaine ou de l'expertise, les paléoanthropologues étant globalement plus critiques que les représentants de tout autre groupe d'expertise. La différence était particulièrement importante pour l'AAH : le score de crédibilité moyen attribué par les paléoanthropologues à ce groupe d’hypothèses (2,10) était bien inférieur au score moyen attribué par les biologistes humains (3,02), les biologistes (2,70) et autres (2,67). Pour les hypothèses sur les zones arides, la différence entre les paléoanthropologues (2,97) et les biologistes humains (3,22) n'était que de 0,25 (contre 0,92 dans le cas des hypothèses liées à l'eau), et les différences dans les scores attribués par les biologistes, les biologistes humains et autres n’étaient pas statistiquement significatifs.

Le tableau 2 montre la répartition selon les spécialistes

Tableau 2

groupe les 12 hypothèses les plus populaires Hypothèse globale sur zones arides Hypothèse aquatique Hypothèses comportementales sur zones arides Hypothèses environnementales sur zones arides
Anthropo 3,71 2,97 2,11 3 2,95
Biologistes 3,95 3,12 2,71 3,25 3,02
Biologie Humaine 3,97 3,22 3,02 3,37 3,11
Autres 3,98 3,22 2,67 3,29 3,16

 

Plus les répondants avaient de connaissances sur l’évolution humaine en particulier, plus les scores accordés à l’AAH étaient faibles. 

Lorsque les hypothèses sur les zones arides ont été divisées en deux groupes selon qu’elles reposaient sur des arguments comportementaux ou sur l’adaptation environnementale, les deux groupes ont obtenu des résultats assez similaires. La principale différence réside dans le fait que les hypothèses comportementales ont reçu des scores de crédibilité moyens légèrement plus élevés.

46 % des répondants n’ont accordé de score « très probable » à aucune des hypothèses, mais la plupart des traits comportaient au moins une hypothèse considérée comme « très probable » par plus de 23 % et « probable » par 72% et « modérément probable ») par 90 %. 

 

Une relation causale entre la parole articulée et la descente du larynx a été acceptée par la plupart des répondants, mais il n'y a pas eu de consensus sur la direction de la causalité. Le fait que le larynx descende parce que cela était requis par la parole articulée a été jugé probable par 84 % et très probable par 43 %. Dans le même temps, le fait que l'évolution de la parole soit déclenchée par la descente du larynx a été jugé probable par 61 % et très probable par 18 %. En fait, 36 % des personnes interrogées ont indiqué que les deux sens étaient également probables.

 

Toutes les hypothèses liées à l’eau ont reçu des notes beaucoup plus « très improbables » que « très probables ». Cependant, quatre hypothèses (selon lesquelles les bébés nageurs, la transpiration abondante, la capacité de plongée et l'ampleur du réflexe de plongée ont évolué en tant qu'adaptations à un mode de vie semi-aquatique) ont reçu tellement de scores « modérément probables » que le pourcentage de répondants qui les ont trouvées probables était légèrement supérieur au pourcentage de personnes les trouvant improbables.

Cependant, les paléoanthropologues étaient clairement plus critiques que les représentants des autres domaines à l'égard de plusieurs hypothèses, notamment : que la nudité avait évolué pour éviter les ectoparasites, que le gros cerveau avait évolué parce que la guerre provoquait une pression en faveur d'une intelligence supérieure, que tous les traits évoluaient en fonction de l'intelligence, et que certains traits évoluaient comme des adaptations à la natation ou à la plongée.

 Dix personnes interrogées (0,8 %) ont expliqué qu'elles ne considéraient aucune des hypothèses comme probable, car elles ne croient pas du tout que les humains ont évolué (la plupart d'entre elles font explicitement référence à une création spéciale de Dieu).

 

L'enquête a demandé l'opinion des personnes interrogées sur vingt arguments critiques qui ont été présentés contre l'hypothèse du singe aquatique. Pour la plupart des arguments, la réponse modale était « sans opinion », en particulier parmi les 43 % des personnes interrogées qui n'avaient jamais entendu parler d'AAH auparavant. Néanmoins, certains arguments ont été clairement plus fréquemment acceptés que d'autres. La critique la plus largement acceptée était que tous les mammifères aquatiques n’ont pas la peau nue et que l’absence de poils ne peut donc pas être considérée comme une adaptation aquatique. À l’autre extrême, moins de 3 % des personnes interrogées sont entièrement d’accord et moins de 12 % sont plutôt d’accord avec la critique selon laquelle l’AAH n’est pas scientifique ou ne mérite pas d’attention pour les raisons avancées ; dans la plupart des cas, le nombre de personnes interrogées fortement en désaccord avec ces critiques était plus élevé que le nombre de personnes interrogées qui étaient plutôt ou entièrement d'accord.

La mesure dans laquelle les répondants représentant différents domaines d'expertise sont d'accord avec les critiques présentées contre l'hypothèse du singe aquatique. La description complète de chaque point de critique se trouve dans le tableau  3 ci-après.

 

AAH La critique
Poils Tous les mammifères aquatiques n'ont pas la peau nue, donc l'absence de poils ne peut pas être considérée comme une adaptation aquatique.
Pas parcimonieux Moins parcimonieux que les autres hypothèses proposées : elle doit expliquer à la fois comment les traits humains ont évolué dans l’eau et comment ils ont été conservés après leur retour sur terre.
Inutile L’AAH n’est pas nécessaire, car tous les traits humains peuvent être expliqués par des scénarios terrestres.
Coïncidence Les humains peuvent ressembler aux mammifères aquatiques par certains traits, mais ce n’est qu’une coïncidence et n’a aucune pertinence évolutive.
Aucune adaptation squelettique L'AAH n'est pas étayée par des preuves fossiles, car celles-ci ne montrent aucune adaptation squelettique à un environnement aquatique.
Déterminisme Un problème majeur de l’AAH est qu’elle repose sur un déterminisme environnemental extrême.
Fossiles non aquatiques L'AAH est contredite par les archives fossiles, car celles-ci suggèrent un environnement non aquatique en permanence.
Moins cohérent AAH est intérieurement moins cohérent que les autres hypothèses proposées.
Les singes nagent Selon AAH, les humains devraient mieux nager que les singes et avoir un corps plus profilé, mais ce n’est pas le cas.
Pas assez de temps Il n'y a pas eu assez de temps pour une phase aquatique.
Anatomie comparée AAH n’est qu’un exercice d’anatomie comparée, pas une hypothèse scientifique.
Evolution des conflits L’AAH entre en conflit avec ce que l’on sait des processus évolutifs en général.
Calendrier inconnu L'AAH manque de crédibilité, car ses partisans ne sont pas d'accord sur le moment et le lieu où la prétendue phase aquatique a eu lieu.
Simpliste AAH est trop simpliste pour être pris au sérieux.
Non évalué par les pairs L’AAH peut être ignorée parce qu’elle n’a pas été publiée dans une revue à comité de lecture et parce qu’elle est principalement discutée dans des forums autres que les revues scientifiques.
Fausses preuves AAH manque de crédibilité, car les preuves présentées en sa faveur sont fausses.
Pas des professionnels L’AAH peut être ignorée, car ses principaux partisans ne sont pas des professionnels dans le domaine de l’évolution humaine.
Pseudoscience AAH est une pseudoscience comparable au créationnisme.
Pas de prédiction L’AAH n’est pas scientifique, car elle ne peut pas faire de prédictions.
Féministe AAH n’est pas scientifique, car elle a été utilisé dans une argumentation féministe.

 

DISCUSSION

Les principaux résultats de notre enquête peuvent être résumés comme suit :

 (1) Il n'y avait pas d'accord général parmi les répondants sur la raison pour laquelle l'un des traits typiquement humains a évolué : Aucune des hypothèses proposées n'a été universellement acceptée ou rejetée. 

(2) Pour chaque trait individuel, le pourcentage de répondants qui ne trouvaient aucune des hypothèses « très probable » se situait entre > 30 % (bipédie) et > 65 % (nudité). 

(3) En général, les opinions sur la crédibilité des hypothèses étaient indépendantes de l'origine de la personne (sexe, âge, domaine d'expertise, degré d'expérience scientifique), mais les paléoanthropologues étaient clairement plus critiques que les représentants d'autres domaines. 

(4) Les hypothèses qui mentionnent l'adaptation à la natation ou à la plongée comme facteur explicatif ont été jugées beaucoup moins crédibles par les paléoanthropologues et légèrement plus crédibles par les biologistes humains que par les biologistes et les représentants d'autres domaines. 

(5) La plupart des personnes interrogées ont critiqué l’hypothèse du singe aquatique (AAH), mais seule une petite minorité la considérait comme non scientifique.

Bien entendu, toutes les conclusions fondées sur les données de l’enquête doivent être considérées comme provisoires, car le nombre de répondants était assez faible et il est possible que les résultats soient biaisés. Les membres d'un sous-groupe pourraient avoir été plus susceptibles de répondre que les membres d'un autre sous-groupe, et les scores de crédibilité moyens attribués aux différentes hypothèses par les répondants peuvent ne pas être représentatifs des opinions de tous les scientifiques de la population de référence. Cependant, il est peu probable qu’une absence d’accord général sur les facteurs déterminants de l’évolution des traits ou une divergence d’opinion aussi nette entre les paléoanthropologues et les autres aient pu apparaître simplement à la suite d’un échantillonnage biaisé.

Nos résultats n’ont pas révélé un ensemble d’explications qui fourniraient collectivement un scénario cohérent et populaire pour l’origine de tous (ou même de nombreux) traits humains. En effet, certaines des hypothèses qui avaient des scores de crédibilité moyens presque égaux et plutôt élevés expliquaient le même trait, alors que pour d’autres traits, aucune hypothèse ne s’est révélée particulièrement populaire. Dans ce contexte, il est intéressant de noter que près de la moitié des personnes interrogées sont entièrement ou majoritairement d’accord avec l’affirmation selon laquelle l’hypothèse du singe aquatique n’est pas nécessaire, car tous les traits humains peuvent être expliqués par des scénarios terrestres.

L’absence d’accord sur les raisons pour lesquelles les humains ont développé les traits que nous avons aujourd’hui est très évidente dans nos résultats : aucune hypothèse n’a été universellement acceptée, et pour la plupart des traits, il existait plusieurs hypothèses alternatives presque tout aussi populaires, plutôt qu’une seule qui serait généralement considérée comme supérieure à l’hypothèse la plus répandue. Aucune des hypothèses n’a reçu la note « très probable » de la part de plus de la moitié des répondants ni n’a obtenu un score de crédibilité moyen supérieur à 4,26 (sur 5). Pour l’absence de poils, l’hypothèse la plus populaire était considérée comme « très probable » par seulement 16 % des personnes interrogées, et son score de crédibilité moyen (3,48) était plus proche de 3 (qui est la limite entre être considérée comme plus probable qu’improbable) que de 4 (modérément probable). De plus, pour seulement deux des traits (couche adipeuse sous-cutanée et larynx descendu), l’hypothèse la plus populaire a été jugée au moins modérément probable par presque tous les répondants, tandis que l’hypothèse suivante la plus populaire a été jugée nettement moins probable. Cela peut refléter en partie le fait que moins d'hypothèses alternatives ont été proposées pour ces traits que pour beaucoup d'autres inclus dans l'enquête.

Il est important de noter que l’absence d’accord ne reflète pas simplement l’ignorance sur le sujet parmi les non-spécialistes, car les réponses étaient, en général, très similaires entre les anthropologues et les répondants représentant d’autres domaines scientifiques. En fait, les anthropologues étaient encore plus sceptiques quant à toutes les hypothèses que les représentants des autres domaines. En d’autres termes, les semi-profanes étaient légèrement plus convaincus que les hypothèses proposées sont plausibles que ceux qui travaillent sur le terrain. Peut-être que les anthropologues (en particulier les paléoanthropologues) sont plus systématiquement formés à se méfier des « belles histoires » (explications d'événements et de processus passés étayées par peu ou pas de preuves) que les étudiants des domaines voisins. Il est également possible que les profanes soient un peu moins susceptibles de remettre en question les hypothèses proposées dans un domaine inconnu. Cela peut être dû au fait qu’ils ne se sentent pas qualifiés pour le faire ou qu’ils n’ont pas entendu parler des débats qui attirent l’attention sur les faiblesses des hypothèses.

Nos résultats sont conformes à la croyance largement répandue selon laquelle les professionnels dans le domaine de l'évolution humaine sont plus critiques à l'égard de l'hypothèse du singe aquatique (AAH) que les semi-profanes. Cependant, cela ne semble pas être dû à une ignorance scientifique globale, car la manière dont les répondants évaluent la crédibilité des hypothèses proposant une adaptation à la natation ou à la plongée est indépendante à la fois de leur niveau d’expérience scientifique global et de la manière dont ils évaluent la crédibilité des autres hypothèses. Il est intéressant de noter que ceux dont le principal domaine d’expertise est la biologie humaine avaient les attitudes les plus positives à l’égard des hypothèses liées à l’eau, leur donnant un score de crédibilité moyen jusqu’à 0,9 unité supérieur au score moyen attribué par les anthropologues.

La différence d’opinion moyenne entre les paléoanthropologues et les autres scientifiques peut être interprétée de deux manières opposées. D’une part, ceux qui connaissent le mieux le domaine de l’évolution humaine sont peut-être les mieux placés pour procéder à une évaluation justifiée de la validité des hypothèses alternatives. D’un autre côté, les connaissances antérieures peuvent inciter à rejeter d’emblée des hypothèses non conventionnelles simplement parce qu’elles remettent en question les paradigmes établis. De toute évidence, les deux interprétations conduisent à des conclusions opposées sur la question de savoir si l’attitude critique des paléoanthropologues peut ou non être considérée comme une preuve que l’AAH est imparfaite. Dans notre enquête, une grande majorité des personnes interrogées ayant une opinion sur la question étaient en désaccord avec l’affirmation selon laquelle l’AAH peut être ignorée parce que ses principaux partisans ne sont pas des professionnels dans le domaine de l’évolution humaine. C'était le cas à la fois dans l'ensemble et au sein de chaque domaine d'expertise séparément, même si la proportion de personnes interrogées qui étaient d'accord avec cette affirmation était plus élevée parmi les paléoanthropologues que parmi les représentants des autres domaines.

Dans ce contexte, il est également intéressant de noter que l'évaluation par les répondants de la crédibilité des hypothèses liées à l'eau ne dépendait pas du nombre d'articles scientifiques qu'ils avaient rédigés. Cela indique que les scientifiques établis ne sont pas plus susceptibles de rejeter ou d’accepter ces hypothèses que les jeunes scientifiques, à moins que leur expérience scientifique ne soit directement liée au domaine de l’évolution humaine. Une grande majorité des personnes interrogées n’étaient pas d’accord avec la critique selon laquelle l’AAH n’est pas scientifique. Bien entendu, cela ne signifie pas qu’ils considéreraient les explications proposées par AAH comme étant correctes, et en effet, toutes les hypothèses liées à AAH ont reçu des scores de crédibilité relativement faibles (bien que pas aussi bas que les hypothèses les moins populaires des terres arides).

Si, pour les besoins de l’argumentation, nous acceptons que l’explication la plus populaire pour chaque trait soit la bonne, un scénario d’évolution par pulsion interne émerge : le gros cerveau a évolué parce qu’une organisation sociale complexe exigeait une intelligence plus élevée, la couche de graisse sous-cutanée a évolué pour devenir servir de réserve d'énergie au cerveau en développement, la parole articulée a évolué parce qu'il y avait une pression sociale pour une communication élaborée, le larynx est descendu parce que cela était requis par la parole articulée, la bipédie a évolué pour faciliter l'utilisation des outils et des armes, et la nudité a évolué pour éviter surchauffe lors de la chasse. Pour la plupart des traits, l’explication suivante la plus populaire n’était pas loin derrière en termes de popularité. La plupart d'entre eux étaient également basés sur des facteurs inhérents, mais parfois dans une séquence temporelle opposée (par exemple, la parole articulée était déclenchée par la descente du larynx ; le gros cerveau évoluait parce qu'il était requis par la parole articulée). Nous avons trouvé ce résultat inquiétant, car l’immense popularité des hypothèses basées sur des facteurs inhérents donne l’impression que l’on pense généralement que l’évolution humaine a été orientée vers un objectif. Cela serait en conflit avec la compréhension actuelle (expliquée dans tous les manuels de biologie évolutionniste) selon laquelle l’évolution est hasardeuse et sans prévision ni projet.

Dans l’ensemble, l’enquête n’a révélé aucun accord général parmi les personnes interrogées : aucune des hypothèses proposées sur les raisons pour lesquelles des traits spécifiquement humains ont évolué n’a été universellement acceptée ou rejetée. Néanmoins, identifier et quantifier ce qui n’est pas généralement connu et convenu peut être utile en soi, car cela peut aider à concentrer les recherches futures sur la réponse aux questions ouvertes les plus importantes. De toute évidence, il reste encore un long chemin à parcourir avant que la question « pourquoi les humains sont-ils si différents des autres primates » ait reçu une réponse globalement satisfaisante.

Bibliographie

Tuomisto H, Tuomisto M, Tuomisto JT
How scientists perceive the evolutionary origin of human traits: Results of a survey study
Ecol Evol 2018 8 6 3518 3533 Published 2018 Feb 26
DOI : 10.1002/ece3.3887

Médecine évolutionniste (ou darwinienne)

Depuis quelques années, le problème de l'antibiorésistance, les progrès de la génomique, la redécouverte du microbiote et la prise en charge de maladies au long cours, nécessitent l'introduction d'une pensée évolutionniste dans la réflexion clinique

Le premier diplôme universitaire intitulé "Biologie de l'évolution et médecine" a été mis en place à la faculté de Lyon en 2016.

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